e pencher en ma faveur? Qu'ai-je fait pour vous, et que suis-je
pour que vous me rendiez un service que personne ne me rendrait? Non,
je n'ose pas vous prier, et, cependant, je vous benirais si vous
exauciez ma priere, toute ma vie serait consacree a vous remercier et
a vous cherir comme l'etre a qui je devrais le plus. Si une
reconnaissance profonde, une tendresse de mere peuvent vous payer d'un
tel bienfait, vous ne regretterez point de m'avoir sacrifie, pour
ainsi dire, deux ans de votre vie. Mon coeur n'est pas froid, vous le
savez, et je sens qu'il ne restera point au-dessous de ses
obligations.
Adieu; repondez-moi courrier par courrier, cela est bien important
pour la conduite que j'ai a tenir vis-a-vis de mon mari. Si vous
m'abandonnez, il faudra que je plie et me soumette encore une fois.
Ah! comme on en abusera!
Adressez-moi votre lettre _poste restante_. Ma correspondance n'est
plus en surete. Mais, grace a cette precaution, vous pouvez me parler
librement. Adieu; je vous embrasse de tout mon coeur.
[1] Cocher.
[2] Valet de chambre.
[3] Jardinier.
XLVIII
AU MEME
Lundi soir. Notant, 8 decembre 1830.
Mon cher enfant,
Laissez-moi vous benir, et n'essayez point de diminuer le prix de ce
que vous faites pour moi. Ne dites pas que vous ne faites que remplir
un engagement, tenir une promesse. Du moment que les nouveaux chagrins
que j'ai eprouves m'ont mise dans la necessite de quitter Nohant une
partie de l'annee, vous etiez degage de tout lien. Vous pouviez me
dire: "J'ai fait le sacrifice de mes interets et de toute mon ambition
a l'espoir de vivre pres d'une amie; mais je ne me suis pas engage a
veiller sur ses enfants en son absence et a supporter l'ennui de la
solitude pendant l'autre moitie de l'annee." Quand je vous ai offert
un sort moins brillant, mais plus doux peut-etre que celui dont vous
jouissez actuellement, je ne prevoyais pas les circonstances ou je me
trouve aujourd'hui. Je me disais que mon amitie vous dedommagerait des
avantages de la fortune, et je vous connaissais assez pour esperer que
vous gouteriez le bonheur sans eclat que mon affection vous
promettait. Maintenant que je me vois forcee de prendre un parti
severe et d'assurer mon repos, ma liberte, par une residence de six
mois par an a Paris, c'est en tremblant que je vous demande de me
consacrer votre temps. Loin de revendiquer comme un droit la promesse
que vous me fites, je
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