meme:--Ah mais! dites donc! c'est que je ne voudrais
pas sentir ses ongles sur ma peau! Moi, d'abord je lache, ni une ni
deux; au premier coup de poing je la fais rouler par terre!
Betty:--Vous ferez comme vous voudrez; ca vous regarde.
Le charretier:--Bon! j'enleve le colis!... Houp! j'y suis."
Et Mme Mac'Miche se trouva chargee comme un sac de farine sur le dos du
charretier, ses jambes pendant par derriere, sa tete retombant sur la
poitrine du charretier. Betty suivait. Ils eurent a peine fait cent pas,
que le fardeau du charretier commenca a s'agiter.
Le charretier:--He! la bourgeoisie! ne bougez pas! C'est qu'elle remue
comme une anguille! Sapristi! Tenez-lui les jambes. Mistress Betty! Elle
bat le tambour sur mes mollets a me briser les os... Allons donc, la
bourgeoise!... Je vais la serrer un brin pour la faire tenir tranquille.
Il la serra si vigoureusement dans ses bras d'Hercule, que Mme Mac'Miche
reprit tout a fait connaissance; et voulant se debarrasser de l'etau
qui arretait sa respiration, elle serra et pinca cruellement le cou
du charretier. Il poussa un cri ou plutot un hurlement effroyable, et
ouvrant les bras il laissa tomber sa vieille ennemie sur un tas de
pierres qui bordaient la route. A son tour, Mme Mac'Miche cria de toute
la force de ses poumons.
"Pourquoi l'avez-vous jetee? dit Betty d'un ton de reproche.
Le charretier:--Tiens! j'aurai voulu vous y voir. Elle m'a pince au
sang, comme une enragee qu'elle est!
Betty:--Pince! pas possible!
Le charretier:--Tenez, voyez la marque sur mon cou!
Betty:--C'est ma foi vrai! Est-elle traitre! Elle n'avait que les doigts
de libres, elle s'en est servie contre vous."
Le charretier:--Je le disais bien! J'en avais comme le pressentiment...
Je ne m'en charge plus cette fois. Faites ce que vous voudrez, je ne la
touche pas, moi. Au revoir, Madame Betty; bien fache de vous laisser
empetree de cette besogne! Vous ne vous en tirerez qu'en la laissant se
calmer en se roulant sur ces pierres. Tenez, tenez! voyez comme elle
s'agite!
Betty, d'un air resigne:--Envoyez-moi du monde, s'il vous plait; je vais
la faire porter chez elle."
Le charretier, qui etait bon homme, s'en alla, mais revint peu
d'instants apres avec un brancard et un ami; ils enleverent Mme
Mac'Miche malgre ses cris, la poserent sur le brancard et la deposerent
chez elle, sur son lit. En guise de remerciement, elle leur prodigua
force injures.
Le charretier:--Allez, allez
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