un jour, Marianne
entra triomphante dans la salle ou etaient Charles et Juliette.
"Charles, cette fois j'ai a te proposer une jeune fille que tu ne
refuseras pas, j'espere, car elle a tout ce que tu peux desirer dans une
femme.
--Et qui est cette merveille? demanda Charles en souriant.
Marianne:--C'est la fille de l'architecte qui est venu s'etablir ici
pour batir l'usine de M. Castel-Oie. Elle est bonne, douce, jolie,
charmante. Ils doivent venir ici ce soir; tu verras par toi-meme.
Charles:--Je ne demande pas mieux, Marianne. Seulement vous savez que je
ne me marierai pas a premiere vue.
Marianne:--Je le sais bien; on te donnera une quinzaine pour la bien
connaitre et la juger. Ils vont arriver bientot. Ne vas-tu pas mettre
ton habit pour les recevoir?
Charles:--Pour quoi faire? Je ne mets mon habit que le dimanche pour
donner le bras a Juliette qui est en grande toilette. Le reste du temps,
je suis toujours en veste ou en blouse.
Marianne:--Comme tu voudras, mon ami; c'etait pour toi ce que j'en
disais."
Et Marianne sortit.
Charles:--Ne te tourmente pas, Juliette. Tu sais ce que je t'ai dit, ce
que je t'ai promis.
Juliette:--Je le sais et je ne me tourmente pas. Mais, Charles, si elle
te plait, si tu crois pouvoir etre heureux avec elle, dis-le moi tout
de suite. N'est-ce pas? Me le promets-tu?
Charles:--Je te le jure, dit Charles en lui baisant les mains; mais, je
te le repete: sois tranquille, je ne l'aimerai pas."
Une heure apres, l'architecte, M. Turnip, arriva accompagne de sa fille.
Charles alla au-devant d'eux.
"C'est sans doute ma cousine Marianne que vous desirez voir, Monsieur?
lui dit-il; je vais la prevenir; en attendant, voici notre chere aveugle
qui va faire connaissance avec vous et avec Mademoiselle votre fille."
Charles approcha des chaises pres de Juliette et alla chercher Marianne,
qui s'empressa d'arriver.
Juliette et Lucy Turnip eurent bientot fait connaissance; Charles
s'assit pres d'elles et causa avec beaucoup de gaiete et d'esprit; il
faisait un temps magnifique; Charles proposa une promenade, qui fut
acceptee.
Marianne allait prendre le bras de Juliette, lorsque Charles,
s'approchant, s'en empara et dit en riant:
"Vous voulez m'enlever mes vieil les fonctions, Marianne; je ne les cede
a personne, vous savez.
Marianne:--Je pensais que tu donnerais le bras a Mlle Lucy.
Charles:--Je regrette beaucoup de ne pouvoir faire comme vous le dites,
Marianne;
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