nnais, je ne
puis en douter."
Marianne proposa au juge une tasse de the, qu'il accepta. Pendant
qu'elle etait allee la preparer a la cuisine, le juge s'approcha de
Juliette, lui prit les mains, la baisa au front et lui dit d'un air
mysterieux:
"A quand la noce, ma petite soeur? Quand faut-il vous afficher?
--Comment? Quoi? repondit Juliette surprise et rougissant.
Charles, riant:--Ah! ah! Vous avez donc devine, Monsieur le juge?
Le juge, tendant la main a Charles:--Tout de suite, au premier mot. Et
je ne concois pas que Marianne n'ait pas eu la pensee que ta future ne
pouvait etre que Juliette. Et je vous fais a tous deux mon compliment
bien sincere; bien fraternel, car je serai votre frere, une fois les
deux mariages faits.
Charles:--Vous ne trouvez donc pas que je fasse une folie en epousant ma
bonne, ma chere Juliette?
Le juge:--Folie! l'action la plus sensee, la meilleure de toute ta vie!
Ou trouveras-tu une femme qui vaille Juliette?
Charles, serrant les mains du juge:--Cher Monsieur le juge! que je suis
heureux! que vous me faites plaisir en me parlant ainsi! J'avais si peur
qu'on ne blamat ma pauvre Juliette de remettre le soin de son bonheur
entre les mains d'un jeune fou comme moi!
Juliette:--Charles, ne parle pas ainsi de toi-meme. Parce que tu as ete
ecervele dans ton enfance, il n'en resulte pas que tu le sois encore.
Trouve dans le pays un homme de ton age qui mene la vie sage et pieuse
que tu menes, et qui voudrait epouser comme toi une femme aveugle et
plus agee que toi, par devouement et par...
Charles:--Et par l'affection la plus pure, la plus vive, je te le jure
Juliette. Ma vie meme te prouve combien cette tendresse est vraie et
profonde.
Le juge:--Chut, mes enfants; j'entends Marianne. Je serai discret,
soyez tranquilles de ce cote."
Le juge continua a venir tous les soirs a la ferme jusqu'au jour de
son mariage, qui se fit sans pompe et sans festin. Il n'y eut que les
temoins necessaires et un repas de famille, apres lequel Marianne
alla prendre possession de son nouvel appartement, ou l'attendait une
surprise preparee par Charles de connivence avec le juge: au milieu de
la chambre, sur une jolie petite table, se trouvait placee une cassette
dont le poids extraordinaire surprit Marianne; elle y trouva en
l'ouvrant un papier sur lequel etait ecrit:
"Present de noce de Charles a sa soeur Marianne."
En enlevant le papier, elle apercut vingt rouleaux de mille francs. Une
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