t de vigueur.
Juliette:--Que fais-tu donc, Charles? Je parie que tu le tourmentes. Il
miaule comme s'il n'etait pas content.
Charles:--Pas du tout! Il imite le bruit de la scie; il est enchante;
s'il etait ouvrier scieur, tu l'entendrais rire... ou jurer peut-etre,
car ils jurent tous... Aie! aie! vilaine bete! Quel coup de griffe il
m'a donne! Le voila qui se sauve. Attends, imbecile! tu vas en recevoir
pour ta peine!"
Avant que Juliette eut eu le temps d'arreter Charles dans ses projets de
vengeance, il avait disparu; elle l'entendit courir, crier des sottises
au chat; puis elle entendit plusieurs miaulements desesperes, deux ou
trois cris pousses par Charles et puis plus rien. Deux minutes apres,
Charles revenait pres de Juliette.
Juliette, agitee:--Charles, qu'as-tu fait du pauvre chat? Pourquoi
a-t-il miaule, et pourquoi as-tu crie?
Charles, emu:--Parce que ton chat est une mechante bete qui m'a mordu,
griffe, qui m'aurait mis en pieces si je ne l'avais maintenu de toutes
mes forces. Aussi l'ai-je fouette d'importance!
Juliette:-Pauvre bete! Ce chat a toujours ete tres bon; c'est toi qui
l'as mis en colere en le tourmentant. Et je suis tres fachee contre toi!
Charles:--Oh! Juliette! tu es fachee contre moi pour un mechant chat qui
m'a fait mal, qui a un caractere detestable, qui ne comprend pas le jeu!
Juliette:--Et comment veux-tu qu'il s'amuse a un jeu qui lui fait mal ou
tout au moins qui l'ennuie?
Charles:--Et c'est ce qui prouve qu'il est bete.
Juliette:--Et parce qu'il est bete, tu le bats, tu le fouettes comme
s'il avait de la raison, comme s'il pouvait comprendre? Tu fais pour lui
pis que ne faisait ta cousine Mac'Miche pour toi.
Charles:--Voyons, Juliette, ne sois pas fachee; pardonne-moi. J'etais
en colere, vois-tu! Il m'avait deja griffe avant que je l'eusse battu.
Juliette:--Je te pardonnerai si tu me promets de ne plus recommencer et
de ne jamais battre mon chat.
Charles:--Je te le promets; je jouerai avec lui sans le battre et sans
le tourmenter.
--Bon; alors je te pardonne, dit Juliette en souriant et en lui tendant
la main.
Charles, l'embrassant:--Merci, ma bonne, ma chere Juliette! Comme tu es
differente de la vieille cousine! Comme je serai heureux pres de toi!
Et comme je t'obeirai! Tu vois deja comme je suis doux! Au lieu de me
mettre en colere, je t'ai demande de suite pardon.
Juliette, riant:--Tu appelles cela etre doux! Et ta colere contre le
pauvre chat?
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