deux armees et me dit
qu'il me destinait a surprendre un corps de troupes anglaises campees
en avant de New-York pour soutenir le fort de Knyphausen, que l'on
regardait comme la cle des fortifications de New-York[173]. Je devais
marcher toute la nuit pour les attaquer avant le point du jour. Il
joignit a mon regiment un regiment de dragons americains (Sheldon),
quelques compagnies de chevau-legers et quelques bataillons
d'infanterie legere americaine. Il avait envoye par un autre chemin, a
environ six milles sur la droite, le general Lincoln avec un corps de
trois mille hommes pour surprendre le fort Knyphausen, que je devais
empecher d'etre secouru. Il ne devait se montrer que lorsque mon
attaque serait commencee, quand je lui ferais dire de commencer la
sienne. Il s'amusa a tirailler avec un petit poste qui ne l'avait pas
vu et donna l'eveil au corps que je devais surprendre. Ce corps rentra
dans le fort, fit une sortie sur le general Lincoln, qui fut battu
et qui allait etre perdu et coupe de l'armee si je ne m'etais pas
promptement porte a son secours.
"Quoique mes troupes fussent harassees de fatigue, je marchai sur les
Anglais; je chargeai leur cavalerie et mon infanterie tirailla avec la
leur. Le general Lincoln en profita pour faire sa retraite en assez
mauvais ordre. Il avait deux ou trois cents hommes tues ou pris et
beaucoup de blesses[174]. Quand je le vis en surete, je commencai
la mienne, qui se fit tres-heureusement, car je ne perdis presque
personne.
[Note 172: M. de Lauzun etait campe en ce moment a Bridgefield.]
[Note 173: Ce corps etait commande par Delancey.]
[Note 174: Guillaume de Deux-Ponts dit dans ses _Memoires_:
quatre-vingts tues ou blesses; mais il n'y etait pas et repete
seulement ce qu'on disait. Les chiffres de Lauzun paraissent pourtant
exageres.]
"Je rejoignis le general Washington, qui marchait avec un detachement
tres-considerable de son armee au secours du general Lincoln, dont
il etait tres-inquiet; mais ses troupes etaient tellement fatiguees
qu'elles ne pouvaient aller plus loin. Il montra la plus grande
joie de me revoir et voulut profiter de l'occasion pour faire une
reconnaissance de tres-pres sur New-York. Je l'accompagnai avec une
centaine de hussards; nous essuyames beaucoup de coups de fusil et de
coups de canon, mais nous vimes tout ce que nous voulions voir. Cette
reconnaissance dura trois jours et trois nuits et fut excessivement
fatigante, car nous fumes jour
|