es trois mille livres prises dans le coffre de Gilles, appela
maitre Landry qui, sa note a la main, accourut, radieux, leger, fendant
l'air de ses bras pour arriver plus vite. Landry, en arrivant a la
table, deploya son papier. Il etait long d'une aune. Et, comme pour
s'excuser de cette menacante longueur, l'aubergiste se hata de dire:
--Dame, monsieur, c'est qu'il y en a long! Et encore, n'ai-je pas marque
les extras.
--Marquez tout, mon cher Landry, fit Pardaillan.
--En ce cas, tout compris, cela fait trois mille livres juste.
Le vieux routier recut le coup sans sourciller et commenca a entrouvrir
sa ceinture de cuir. Le visage de Landry, qui etait radieux, devint
incandescent, tant l'emotion le fit flamboyer.
"Enfin!" murmura-t-il dans un souffle.
"Le voila! Le voila!" tonna a ce moment une voix furieuse.
En meme temps, trois personnages, qui venaient d'entrer a l'instant meme
dans la salle, degainerent et se precipiterent sur Pardaillan. L'auberge
se remplit de cris. La main de Pardaillan, qui touchait la fameuse
ceinture, descendit jusqu'a la rapiere qu'elle mit au vent.
Le sourire de Landry se termina en grimace de douleur et d'epouvante...
Pardaillan avait, d'un coup de pied, renverse la table ont toute la
vaisselle s'etait ecroulee.
Huguette s'etait enfuie dans la cuisine.
Les trois enrages portaient coup sur coup.
--Cette fois, pas de caution! ricanait l'un.
--Cette fois, pas de quartier! hurlait le second.
Le premier, c'etait Maugiron. L'autre, Quelus.
Le troisieme, qui ne disait rien, mais qui s'escrimait avec une rage
froide, c'etait Maurevert.
Ils etaient entres a tout hasard dans l'auberge, sachant que la
Deviniere avait ete longtemps le quartier general des Pardaillan.
A defaut du chevalier, ils trouvaient le pere et, sans plus de
reflexion, s'etant consultes d'un rapide regard, ils le chargerent.
Pardaillan, affaibli par les blessures qu'il avait recues rue
Montmartre, se contenta d'etablir un peu de defensive.
Il avait sur sa poitrine trois pointes menacantes.
A chaque coup qui lui etait porte, il parait s'il pouvait, ou reculait
d'un bond.
La bataille etait silencieuse, cette fois. Les trois etaient resolus a
tuer le pere en attendant le fils, et ils gardaient toutes leurs forces,
tout leur sang-froid, jouant serre, cherchant le coup mortel.
Pardaillan reculait donc. Malheureusement, ses trois adversaires etaient
places en bataille entre lui et la porte de
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