torite d'un president de cercle.
Elle le regarda, le visage bouleverse, les levres tremblantes.
--Oh! monsieur, je vous en prie, ne me repoussez pas. Si ce n'est pas
pour moi que vous m'ecoutez, et je le comprends, puisque vous ne me
connaissez pas, que ce soit pour mes enfants, pour mes trois petites
filles, qui dans un mois, peut-etre dans huit jours, seront jetees dans
la rue, mourant de faim, de froid, si vous n'intervenez pas. Vous avez
une fille que vous aimez, c'est au pere que je m'adresse.
--Vous me connaissez, vous connaissez ma fille?
--Non, monsieur, je ne connais pas mademoiselle Adeline, mais je sais
que vous avez une fille, et c'est en pensant a elle que l'esperance
s'est presentee a moi que vous nous viendrez en aide. Desesperee par les
pertes au jeu de mon mari, j'ai cherche, comme une affolee que je
suis, a qui je pourrais demander protection, et l'idee m'est venue,
l'inspiration, que si je n'avais pas pu empecher mon mari d'aller au
cercle ou il s'est ruine, le president de ce cercle pourrait lui en
fermer les portes. Mais ce president etait-il homme a m'entendre? ou
bien me repousserait-il parce qu'il profitait lui-meme de la ruine des
joueurs... comme il y en a, m'a-t-on dit? Par mon mari que j'avais
interroge, je savais quel homme politique vous etes, la situation
que vous occupez, l'estime dont vous etes entoure; c'etait beaucoup;
pourtant ce n'etait pas assez; dans l'homme politique y avait-il un
homme de coeur capable de se laisser attendrir par le desespoir d'une
mere? J'ai une amie de couvent mariee a Rouen, je lui ai ecrit pour
qu'elle tache d'apprendre quel homme etait M. Constant Adeline. Sa
reponse, vous la connaissez sans que je vous la dise. C'est alors, quand
j'ai su quel pere vous etes pour votre fille, que la foi en vous m'est
venue, et que j'ai eu le courage d'entreprendre cette demarche.
Peu a peu il s'etait laisse gagner: cette voix vibrante, ces beaux yeux
qui plusieurs fois s'etaient noyes de larmes, cet elan, et en meme temps
cette discretion dans les paroles, surtout cette evocation de Berthe lui
troublaient le coeur.
--Que puis-je pour vous? Ce qui me sera possible, je vous promets de le
faire.
--Je sentais que je ne m'adresserais pas a vous en vain, et de tout
coeur je vous remercie de vos paroles: quand je vous aurai explique
notre situation, vous verrez, et beaucoup mieux que je ne le vois
moi-meme, comment vous pouvez nous sauver, et de quelle facon vous
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