ace, bonsoir!
--Je vous porterai les remerciements de ma femme, dit Combaz en lui
serrant les deux mains avec effusion, et je vous conduirai mes deux
ainees pour qu'elles vous embrassent.
--J'irai chercher chez vous les remerciements de madame Combaz, dit
Adeline, et les embrassements de vos cheres petites; il ne faut pas que
vous repassiez la porte du cercle.
--N'ayez donc pas peur, dit Combaz en riant.
Adeline s'en revint a pied, lentement, marchant allegrement, la
conscience satisfaite: il avait sauve un brave garcon. Sans doute dans
ce sauvetage, il y avait eu bien des choses cruelles pour lui, bien des
points de contact douloureux entre cette situation et la sienne, mais
enfin la satisfaction du devoir accompli le portait: il avait fait son
devoir.
En passant place de la Madeleine, il hesita s'il rentrerait chez lui se
coucher ou s'il irait faire un tour au cercle; sur de ne pas se laisser
entrainer au jeu ce soir-la, alors qu'il etait encore tout fremissant de
ses propres paroles, il se decida pour le cercle.
Quand il entra dans la salle de baccara, le croupier prononcait les
mots qui, si souvent, retentissent dans une nuit: "Le jeu est fait".
Machinalement il regarda qui taillait: un cri de surprise lui monta aux
levres, c'etait Combaz; alors il s'approcha de la table et regarda les
enjeux: environ une vingtaine de mille francs et Combaz n'avait plus
que quelques cartes dans la main gauche, le reste de sa taille, que ses
doigts serraient nerveusement, tandis que sur son visage pale glissaient
des filets de sueur.
--Rien ne va plus?
A ce moment les yeux de Combaz rencontrerent ceux d'Adeline et vivement
il les detourna, puis il donna les cartes.
Le tableau de droite et le tableau de gauche, ayant demande des cartes,
recurent l'un un dix, l'autre une figure; alors une hesitation manifeste
se traduisit sur le visage de Combaz et ses yeux vinrent chercher une
inspiration dans ceux d'Adeline. Devait-il ou ne devait-il pas tirer?
Si furieux que fut Adeline, il etait encore plus anxieux. Le joueur
l'emporta sur le president, et ses yeux dirent ce qu'il eut fait
lui-meme. Combaz ne tira point et gagna.
--Je vous disais bien que j'allais avoir une serie! s'ecria Combaz en
venant vivement a Adeline, c'est cette certitude qui m'a empeche de
rentrer, j'ai pris une voiture, et vous voyez que j'ai eu raison.
--Au moins allez-vous vous sauver maintenant.
--Au plus vite.
Tandis que Combaz changeait
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