luies.
"On a d'abord sous ses yeux la grande vallee de l'Allee-Blanche, qui
etant parallele a la direction general de cette partie des Alpes, est
du nombre de celles que je nomme _longitudinales_; et l'on voit cette
vallee barree a l'une de ses extremites par le Col de la Seigne et a
l'autre par le Col Ferret. En se retournant du cote de l'Italie, on voit
plusieurs vallees a-peu-pres paralleles a celle-la, comme celle de la
Tuile, celle du Grand Saint Bernard, qui toutes aboutissent, par le
haut, a quelque Col tres-eleve, et par le bas, a la Doire, ou elles
viennent se jeter vis-a-vis de quelque montagne qui leur correspond de
l'autre cote de cette vallee.
"Si l'on considere ensuite cette meme vallee de la Doire, qui descend
de Courmayeur a Yvree, on la verra barree par le Mont-Blanc et par
la chaine centrale, qui la coupent a angles droits dans la partie
superieure. On verra cette meme vallee s'ouvrir, dans un espace de sept
ou huit lieues, deux ou trois inflexions tout-a-fait brusques; et on
la verra enfin coupee a angles droits par une quantite de vallees qui
viennent y verser leurs eaux, et qui sont elles memes coupees par
d'autres, dont elles recoivent aussi le tribut. Or quand on reflechit a
la largeur et a l'etendue des courans de la mer, peut-on concevoir
que ces sillons etroits, barres, qui se coupent en echiquier a de
tres-petites distances, aient pu etre creuses par de semblables courans.
"L'observation de la correspondance des angles, fut-elle aussi
universelle qu'elle l'est peu, ne prouveroit donc autre chose, sinon que
les vallees sont nees de la fissure et de l'ecartement des montagnes, ou
qu'elles ont ete creusees par les torrens et les rivieres qui y coulent
actuellement. On voit un grand nombre de vallees naitre, comme je l'ai
fait voir au Bon-Homme, Sec. 767, sur les flancs d'une montagne; on les
voit s'elargir et s'approfondir a proportion des eaux qui y coulent; un
ruisseau qui sort d'une glacier, ou qui sort d'une prairie, creuse un
sillon, petit d'abord, mais qui s'agrandit successivement a mesure
que ses eaux grossissent, par la reunion d'autres sources ou d'autres
torrens.
"Il n'est meme pas necessaire, pour se convaincre de la verite da ces
faits, de gravir sur le Cramont. Il suffit de jeter les yeux sur
la premiere carte que l'on trouvera sous la main, des Pyrenees, de
l'Apennin, des Alpes, ou de quelqu'autre chaine de montagnes que ce
puisse etre. On y verra toutes les vallees indique
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