tion et une inclinaison generale et constante, on pourroit tout
au plus hazarder a ce sujet de legeres conjectures; mais si l'ordre
primitif de ces montagnes est derobe a l'oeil de l'observateur, on
trouve a chaque pas des indices certains, des marques evidentes de la
maniere dont il a ete altere ou detruit.
"Je reconnus d'abord que les memes cailloux, les memes debris de marbre
et d'ardoise qui couvraient le fond de la vallee, et que le Gave
entraine et remplace sans cesse, se trouvent aussi a plusieurs toises
au-dessus de son niveau. Je voyois quelquefois les sedimens fluviatiles
recouverts et ensevelis sous des grandes masses de pierre feuilletee
adherente a la montagne; levant ensuite les yeux, j'observai que de l'un
ou de l'autre cote du torrent, les flancs des montagnes etoient souvent
couverts et comme plaques de semblables masses de schiste, dont les
couches et les feuillets offroient toujours des directions contraires a
celles des schistes de meme nature, auxquels ils etoient adosses.
Les eaux du torrent, qui ont sans doute renverse ces couches sur
elles-memes, y ont depose des marques de leur passage; elles ont
abandonne, engage sous ces debris memes, a des grandes hauteurs, des
blocs enormes de granit que le voyageur surpris voit pendre sur sa tete;
de pareils blocs arrondis et uses couvrent le fond de la vallee, et
opposent quelquefois au torrent une digue qui le fait jaillir et
retomber en ecume; enfin j'ai suivi les traces de ce courant aux
differentes hauteurs des parois du canal ou il coule aujourd'hui a
plusieurs centaines de toises de profondeur. Il a du les parcourir
toutes successivement en creusant et retrecissant sont lit et augmentant
sa vitesse.
"Les cretes des sommites qui forment les bords les plus eleves de
la gorge, sont escarpees dans la direction du courant. J'ai apercu
quelquefois des portions de montagnes separees de la crete, ou du sommet
principal, et dont les eaux semblent en avoir fait des especes d'iles,
en creusant autour d'elles un fosse profond, ou l'on voit fort bien
les angles saillans de l'ile correspondre aux angles rentrans de la
montagne, etc.
"Dans la partie de la vallee ou s'observent ces phenomenes, on marche
toujours entre deux montagnes resserrees, dont les nuage derobent
souvent les cimes, mais par-tout ou les eaux de quelque torrent
considerable viennent se reunir a celles du Gave, il s'est forme un
bassin d'une etendue moyenne, qui ne fut d'abord vraisemblablem
|