fut, sans contredit, l'un des agents les plus actifs
de la conversion de Louis XIV. Il avait preche a la cour l'Avent de 1670
et les caremes de 1672, de 1674 et de 1675.
Hardi comme un tribun et courageux comme un apotre, il retournait le fer
dans la plaie. S'adressant un jour directement a Louis XIV, il s'etait
ecrie:
"Ce qui sauve les rois, c'est la verite; Votre Majeste la cherche et elle
aime ceux qui la lui font connaitre, elle n'aurait que des mepris pour
quiconque la lui deguiserait, et, bien loin de lui resister, elle se fait
gloire d'en etre vaincue."
Les exhortations de Bossuet n'etaient pas moins pressantes; ses fonctions
de precepteur du dauphin lui donnaient un acces frequent aupres du roi, et
il en profitait pour plaider avec energie la cause du devoir et de la
vertu. C'est lui qui avait dit, dans son sermon sur la purification,
prononce a la cour: "Fuyons les occasions dangereuses et ne presumons pas
de nos forces. On ne soutient pas longtemps sa vigueur quand il la faut
employer contre soi-meme."
C'est encore lui qui ecrivait au marechal de Bellefonds: "Priez Dieu pour
moi; priez-le qu'il me delivre du plus grand poids dont un homme puisse
etre charge, ou qu'il fasse mourir tout l'homme en moi pour n'agir que par
lui seul. Dieu merci, je n'ai pas encore songe, durant tout le cours de
cette affaire, que je fusse au monde; mais ce n'est pas tout, il faudrait
etre comme un saint Ambroise, un vrai homme de Dieu, un homme de l'autre
vie, ou tout parlat, dont les mots fussent des oracles du Saint-Esprit,
dont toute la conduite fut celeste. Priez, priez, je vous en conjure."
Avec quel respect, mais aussi avec quelle fermete et quelle noblesse de
langage et de pensee, le grand eveque s'adresse au Grand Roi: "J'espere,
lui ecrit-il, que tant de grands objets qui vont tous les jours occuper de
plus en plus Votre Majeste, serviront beaucoup a la guerir. On ne parle
plus que de la beaute de vos troupes et de ce qu'elles sont capables
d'executer sous un aussi grand conducteur; et moi, sire, pendant ce temps,
je songe secretement en moi-meme a une guerre bien plus importante et a
une victoire bien plus difficile que Dieu vous propose."
"Meditez, sire, ecrit-il encore, cette parole du Fils de Dieu: elle semble
etre prononcee pour les grands rois et pour les conquerants: Que sert a
l'homme, dit-il, de gagner tout le monde, si cependant il perd son ame? et
quel gain pourra le recompenser d'une perte si consid
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