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l'antiquite. Enfin, au mois d'octobre 1660, il meurt dans des sentiments
tres chretiens, et dit, sur son lit de mort:
"Le seul regret que j'ai, c'est de ne pas laisser de biens a ma femme, de
qui j'ai tous les sujets imaginables de me louer."
Veuve, Mme Scarron recherche surtout l'estime. Plaire en restant
vertueuse, supporter, s'il le faut, les privations, la misere meme, mais
conquerir le nom de femme forte, meriter les sympathies et les suffrages
des gens serieux, tel est le but de tous ses efforts. Bien habillee,
quoique tres simplement, discrete et modeste, intelligente et distinguee,
ayant cette elegance innee que le luxe ne donne pas et qui provient
seulement de la nature; pieuse d'une piete vraie, s'occupant plus des
autres que d'elle-meme, parlant bien, et, ce qui est plus rare encore,
sachant ecouter, s'interessant aux joies et aux chagrins de ses amis,
habile dans l'art de les distraire, de les consoler, elle est regardee
avec raison comme une des femmes les plus aimables et les plus superieures
de Paris.
Econome et simple dans ses gouts, elle equilibre son modeste budget, grace
a une pension annuelle de deux mille livres, qui lui est faite par la
reine Anne d'Autriche. Elle est recue avec empressement par Mmes de
Sevigne, de Coulanges, de Lafayette, d'Albret, de Richelieu. C'est
l'epoque la plus tranquille et, sans doute, la plus heureuse de sa vie.
Mais la mort de sa bienfaitrice, la reine mere (20 janvier 1666), lui fait
perdre la pension qui est son unique ressource. Un grand seigneur tres
riche et tres vieux la demande en mariage; elle refuse. Elle est sur le
point de s'expatrier pour suivre la princesse de Nemours, qui va
epouser le roi de Portugal. Son etoile la retient en France, ou elle sera
un jour presque reine. Elle ecrit a Mlle d'Artigny:
"Menagez-moi, je vous prie, l'honneur d'etre presentee a Mme de Montespan,
lorsque j'irai vous faire mes adieux; que je n'aie pas a me reprocher
d'avoir quitte la France sans en avoir revu la merveille."
Mme de Montespan n'etait encore celebre que par sa beaute; mais sa
situation de dame du palais de la reine la rendait deja influente. Elle
trouva Mme Scarron charmante et lui obtint le retablissement de la
pension de deux mille livres, qui lui permit de ne pas aller en Portugal.
Heureuse de cette solution, la belle veuve, adonnee aux bonnes oeuvres et
aux lectures serieuses, meditant le livre de Job et les Maximes de La
Rochefoucauld, visitant l
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