lus d'un auteur,
Avec la plus stricte rigueur,
S'en tenaient aux robes montantes;
Et, par un exces de pudeur
Dont on retrouve encor la trace,
Se resignaient de bonne grace,
Pour mieux cacher leurs cous mignons,
A porter d'enormes chignons
Que leurs coiffeurs, mis en campagne
Et charges de ces soins discrets,
Leur faisaient venir tout expres
De Picardie et de Bretagne.
J'ai vu des factures du temps;
Un chignon du plus grand modele,
Bien monte, garanti quatre ans,
De la qualite la plus belle,
Valait de quatre a cinq cents francs,
Mais quelle solide coiffure!
Decidement, je vous le jure,
C'est un luxe que je comprends
Que celui de la chevelure.
C'etait un si bel ornement
Que ces chignons! Et puis vraiment,
Pour une mere de famille,
Est-il un souci plus charmant
Que de leguer par testament
Ses fausses nattes a sa fille?
Enfin, pour vous depeindre mieux
Cette epoque exceptionnelle,
Je puis vous apprendre sur elle
Un detail assez curieux.
Suivant le quartier de la lune
Une femme etait blonde ou brune
Et, de la veille au lendemain,
Changeait sa paleur en carmin:
Car on detestait la paresse
Dans cet age a present vante.
Vous voyez, sans qu'il y paraisse,
Que nous n'avons rien invente.
Mais, n'importe! En prenant la plume,
Mon intention n'etait point
De tant discourir sur ce point.
N'y voyez aucune amertume,
Si je l'ai fait, c'est qu'au moment
De vous commencer mon histoire,
Il m'est venu subitement
Un scrupule, et voici comment:
Si vous alliez ne pas y croire?
Mes deux heros sont bien constants!
Un amour que rien ne separe,
Cela se voit de notre temps;
Mais c'est un exemple bien rare
A toute autre epoque. Et voila
Pourquoi je disais tout cela.
Car, ce que vous allez entendre,
Il fallait bien vous l'expliquer,
Et commencer par vous apprendre
Que le temps dont je veux parler
Ressemble au notre a s'y tromper.
Des lors, ce que je vais conter
N'a plus rien qui doive surprendre,
Et je commence.
II
Les savants,
Qui font bailler de pauvres gens
Et dessecher de pauvres roses,
Passent pour savoir toutes choses.
Eh bien! (jugez d'apres cela
Du niveau de l'Academie)
Je n'en sais pas un qui nous die
Comment Leone se trouva
Etre, a seize ans, la plus jolie
Des danseuses de ce temps-la.
Pauvre fille de comedie!
Dont nul n'a raconte
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