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Echangeant un baiser?
Tous deux vont oublier,
S'ils sont sur mon passage.
Mais je n'entends plus rien
Qu'une timide plainte.
C'est la voix presque eteinte
D'un sylphe aerien.
LE POETE.
Une brise plus fraiche a dissipe la nue;
Comme un essaim trouble, l'ouragan s'est enfui;
La lune, encor voilee, apparait, demi-nue.
C'est etrange. On dirait qu'une force inconnue
A disperse soudain les horreurs de la nuit.
Quel est ce bruit qui vient de reveiller la greve?
Une voix inconnue a traverse les airs:
Qui donc, a pareille heure, est en ces lieux deserts?
Mais non, je me trompais. Nul accent ne s'eleve.
Personne.... Je suis seul au bord des flots amers,
C'est une vision qui passe comme un reve.
Pourtant, qu'entends-je encore? On parle cette fois.
Je ne distingue rien, malgre le clair de lune;
Mais la brise de nuit, qui souffle de la dune,
M'apporte jusqu'ici l'echo de cette voix.
Ce n'est point la le son d'une parole humaine;
Elle est imperieuse et douce en meme temps.
A travers quelques mots que je distingue a peine,
J'entends confusement que cette voix lointaine,
D'un timbre doux et clair, commande aux elements.
Sitot qu'elle a passe, partout nait le silence.
Pourtant, de ce cote je crois qu'elle s'avance:
Quel est-il, ce Genie errant, dont les baisers
Rasserenent les flots, par son aile apaises?
Si c'est une ombre encor, ce n'est plus l'Esperance,
Sa voix etait moins breve.--Ange mysterieux,
Qui descends sur la terre a l'heure ou tout repose,
Toi de qui la parole ordonne a toute chose!
Dis-moi ton nom avant de remonter aux cieux.
L'OUBLI.
Je suis le frere du Silence.
Dieu me donne un pouvoir immense;
Je repands l'eternelle nuit,
Et je puis, du bout de mon aile;
Effacer la trace mortelle
Et de la Joie et du Souci.
Mes compagnons sont le Mystere
Et le Bruit, l'Ombre et la Lumiere;
Quant a moi, le Temps est mon pere,
Et je suis aussi vieux que lui.
Je suis le sommeil de l'aurore,
L'ivresse que le vin colore;
L'homme me maudit et m'implore,
Car je suis l'Ange de l'oubli.
LE POETE.
Sur mon passage, alors c'est le ciel qui t'amene.
Avant de t'envoler, repands a coupe pleine
Ton baume bienfaisant sur mon coeur en lambeaux.
Ange, viens m'effleurer de ton aile si pure,
Car je porte dans l'ame une large blessure
Qui ronge ma poitrine, et sa rude morsure
Fait eclater mon coeur et le
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