que toutes nos tendresses
Nous coutent tant de pleurs?
Certes! j'aurais jure de l'avoir oubliee,
Elle qui m'a tant fait souffrir quand je l'aimais,
Et voila que ma plaie a peine refermee
Saigne plus que jamais!
Passy, Mai 1860.
A MADAME L***
C'est amusant, a deux, de courir dans les bois,
Et de rever le soir au frais des grands ombrages.
En parlant a voix basse errer sous les feuillages,
N'est-ce pas un bonheur a faire envie aux rois?
Cependant un boudoir, lorsque de petits doigts
Vous en ouvrent la porte, a bien ses avantages,
Qui partout ont semble divins, meme aux plus sages.
C'est mon avis, et c'est le votre aussi, je crois.
On dit meme, est-ce vrai? qu'une bonne voiture
Quand les coussins sont doux, moins pourtant que les yeux
De celle qui l'occupe, est chose qui s'endure.
Un seul point me surprend: ces mots mysterieux
Que le coeur seul entend, que la bouche murmure,
Oh! comme on les oublie apres un an ou deux!
Passy, Juin 1860
ADIEU, NINON
Depuis longtemps,
Trop longtemps, je soupire.
Il est grand temps
Aujourd'hui de me dire
Si vous voulez
Jouer avec ma flamme.
Parlez, madame,
Mais vous me le paierez.
Allons, mon coeur,
Et cachez, je vous prie,
Cet air moqueur
Qui vous rend moins jolie.
Quoi! vous osez
Rire de mon attente?
Riez, mechante,
Mais vous me le paierez.
Helas! pourquoi
Faut-il que je vous aime,
Fille au coeur froid,
Qui n'aimez que vous-meme?
Vous souriez?
Ma peine est bien etrange,
Allez, mon ange,
Mais vous me le paierez.
Pourquoi tantot
Votre voix si rieuse,
Au piano
Etait-elle reveuse?
Vous le savez,
Cela vous rend plus belle.
Chantez, cruelle,
Mais vous me le paierez.
Melant nos pas
Dans un meme dedale,
Quand dans mes bras
La Valse vous rend pale,
Vous ne songez,
Vous, qu'a votre toilette.
Dansez, coquette,
Mais vous me le paierez.
Mais quel courroux!
Vous aurais-je blessee?
Quels yeux moins doux!
Quelle moue offensee!
Vous vous fachez?
Vous etes en colere?
Boudez, ma chere,
Mais vous me le paierez.
Adieu, Ninon.
Eh bien! quel est ce geste?
Qu'avez-vous donc?
Voulez-vous que je reste?
Ciel! vous pleurez
Votre main me rappelle....
Ple
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