d'une
fievre oubliee et qui revient.
-- Et vous ne m'invitez pas? continua le roi.
-- Sire, repondit Fouquet, je ne songeais pas a cette fete, et
c'est hier au soir seulement qu'un de mes amis, Fouquet appuya sur
le mot, a bien voulu m'y faire songer.
-- Mais hier au soir je vous ai vu et vous ne m'avez parle de
rien, monsieur Fouquet.
-- Sire, comment esperer que Votre Majeste descendrait a ce point
des hautes regions ou elle vit jusqu'a honorer ma demeure de sa
presence royale?
-- Excusez, monsieur Fouquet; vous ne m'avez point parle de votre
fete.
-- Je n'ai point parle de cette fete, je le repete, au roi d'abord
parce que rien n'etait decide a l'egard de cette fete, ensuite
parce que je craignais un refus.
-- Et quelle chose vous faisait craindre ce refus, monsieur
Fouquet? Prenez garde, je suis decide a vous pousser a bout.
-- Sire, le profond desir que j'avais de voir le roi agreer mon
invitation.
-- Eh bien! monsieur Fouquet, rien de plus facile, je le vois, que
de nous entendre. Vous avez le desir de m'inviter a votre fete,
j'ai le desir d'y aller; invitez-moi, et j'irai.
-- Quoi! Votre Majeste daignerait accepter? murmura le
surintendant.
-- En verite, monsieur, dit le roi en riant, je crois que je fais
plus qu'accepter; je crois que je m'invite moi-meme.
-- Votre Majeste me comble d'honneur et de joie! s'ecria Fouquet;
mais je vais etre force de repeter ce que M. de La Vieuville
disait a votre aieul Henri IV: _Domine, non sum dignus._
-- Ma reponse a ceci, monsieur Fouquet, c'est que, si vous donnez
une fete, invite ou non, j'irai a votre fete.
-- Oh! merci, merci, mon roi! dit Fouquet en relevant la tete sous
cette faveur, qui, dans son esprit, etait sa ruine. Mais comment
Votre Majeste a-t elle ete prevenue?
-- Par le bruit public, monsieur Fouquet, qui dit des merveilles
de vous et des miracles de votre maison. Cela vous rendra-t-il
fier, monsieur Fouquet, que le roi soit jaloux de vous?
-- Cela me rendra le plus heureux homme du monde, Sire, puisque le
jour ou le roi sera jaloux de Vaux, j'aurai quelque chose de digne
a offrir a mon roi.
-- Eh bien! monsieur Fouquet, preparez votre fete, et ouvrez a
deux battants les portes de votre maison.
-- Et vous, Sire, dit Fouquet, fixez le jour.
-- D'aujourd'hui en un mois.
-- Sire, Votre Majeste n'a-t-elle rien autre chose a desirer?
-- Rien, monsieur le surintendant, sinon, d'ici la, de vous avoir
pres de moi le
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