mes la noirceur de
leurs calomnies.
De retour au monastere, Longis et Onoflette vecurent encore quelque
temps ensemble dans une parfaite quietude et s'exhortant mutuellement a
la piete. Mais, comme cette vie est transitoire, Onoflette mourut a
Vernon-sur-Seine, pendant un voyage qu'elle fit dans cette ville.
Longis, averti de la mort de sa pieuse compagne, vint chercher le corps
et l'inhuma pres de son monastere, dans un lieu ou l'on batit depuis une
eglise paroissiale.
L'Eglise placa au nombre de ses saints le bienheureux Longis et la
bienheureuse Onoflette.
Du temps ou ils firent leur salut ensemble dans la solitude des bois, il
y avait encore des nymphes dans les sources sacrees; des tableaux votifs
etaient suspendus avec des images aux branches des chenes sacres. Les
humbles dieux des paysans ne s'etaient pas tous enfuis devant le signe
de la croix et l'eau benite. Il est bien probable que de petits faunes
ignorants et rustiques, se sachant rien de la bonne nouvelle, epierent
entre les branches Onoflette et Longis, et, les prenant pour un chevrier
et pour une bergere, jouerent innocemment du pipeau sur leur passage.
Il fallut beaucoup d'exorcismes pour chasser ces menues divinites. Il
subsiste encore aujourd'hui, aux environs de Vernon, quelques vestiges
des ceremonies paiennes. La veille du dimanche des brandons, les
habitants des campagnes se rendent le soir dans les champs et se
promenent sous les arbres avec des falots en chantant quelque vieille
invocation. Fideles sans le savoir a Ceres, leur mere, ces bonnes gens
reproduisent ainsi d'antiques mysteres et figurent d'une maniere encore
reconnaissable la deesse qui cherchait sa fille Proserpine a la lueur
des feux de l'Etna. Je rapporte le fait sur la foi de M. Adolphe Meyer,
le savant historien de la ville de Vernon.
Les plus magnifiques monuments ne sont pas toujours ceux qui parlent le
plus a l'esprit; parfois les yeux et la pensee ont peine a se detacher
d'une humble pierre taillee par un ciseau barbare. Il est dans le vieux
Vernon, proche la collegiale, devenue aujourd'hui l'eglise paroissiale,
une petite rue deserte qui conduit a la Seine. Elle est bordee de
pauvres maisonnettes penchantes qui se soutiennent a grand'peine les
unes les autres. Au milieu de ces masures s'eleve une maison de pierre
qu'on dit avoir ete jadis habitee par le controleur clerc d'eau.
Elle a deux fenetres et une porte. Au-dessus de la porte, un humble
sculpteur qui viv
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