oeur, par une arriere-pensee qu'il avait d'etre
agreable aux Flamands et de reprendre en temps opportun les Flandres au
roi d'Espagne. A cette ouverture, Henri de France fut ebloui, et s'ecria
soudain:
"O reine, ne cherchez plus; il faut que vous alliez aux eaux de Spa.
Vous direz que les medecins vous les ont ordonnees, qu'a cette heure la
saison est propice, et que je vous ai commande d'y aller. Bien plus, la
princesse de la Roche-sur-Yon m'a promis de vous accompagner."
Voila comment ce bon sire fut dupe de son ambition d'avoir les Flandres.
La reine mere, de son cote, ne vit, tout d'abord, que l'avantage de
cette grande conquete et, sans soupconner a sa fille une arriere-pensee,
elle consentit a son depart. Comme elle avait toujours en sa reserve
politique un projet cache, elle fit prevenir, par un courrier, le
gouverneur des Flandres pour le roi d'Espagne, en demandant les
passeports necessaires pour ce long voyage. Or, le gouverneur des
Flandres n'etait rien moins que ce celebre, ce fameux don Juan
d'Autriche, vainqueur a Lepante, et qui comptait parmi ses soldats ce
vaillant et divin genie appele Michel Cervantes.
La reine mere, en ce moment, se rappelait l'eblouissement de don Juan
d'Autriche a l'aspect de sa fille Marguerite, et comme, en plein Louvre,
il l'avait comparee aux etoiles, avec une ardeur toute castillane:
"Allez, ma fille, et songez aux interets de la France!" disait la reine
mere, et deja, dans sa pensee, elle voyait don Juan d'Autriche offrir
a la belle voyageuse au moins les domaines de l'eveque de Liege, dans
lesquels murmuraient doucement ces belles eaux de Spa, salutaires
fontaines encore inconnues, reservees a une si grande celebrite.
Ainsi, pendant que la reine mere et le roi s'en allaient a Poitiers
chercher l'armee de M. de Mayenne, afin de la conduire en Gascogne
contre le roi de Navarre et les huguenots, la reine Marguerite allait,
a petites journees, dans ces Flandres qu'elle ne songeait guere a
conquerir. Elle etait accompagnee en ce beau voyage de Mme princesse de
la Roche-sur-Yon, de Mme de Tournon, sa dame d'honneur, de Mme de Mouy
de Picardie, de Mme de Castelaine de Millon, de Mlle d'Atrie, de Mlle de
Tournon, et de sept ou huit autres demoiselles des meilleures maisons.
A cette suite royale s'etaient reunis M. le cardinal de Senoncourt, M.
l'eveque de Langres, M. de Mouy, enfin toute la maison de la reine,
a savoir: le majordome et le premier maitre d'hotel, les pages, le
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