d
monde, ou elles trouvent tres bien leur place.
A la fin il fallut se quitter, et Marguerite, pour reconnaitre une
hospitalite si liberale, distribua toutes sortes de presents a ces dames
qui l'avaient si bien recue: tant de chaines, de colliers, de bracelets,
de pierreries, si bien qu'elle fut reconduite jusqu'a mi-chemin de
Namur, ou commandait un des plus vieux courtisans de la cour de Philippe
II. Sur les confins de Namur, reparut don Juan d'Autriche, accompagne
des seigneurs les plus qualifies de la cour d'Espagne et d'une grande
suite d'officiers et gentilshommes de sa maison, parmi lesquels etait un
Ludovic de Gonzague, parent du duc de Mantoue.
Il mit pied a terre pour saluer l'illustre voyageuse, et quand la
cortege reprit sa marche, il accompagna la litiere royale a cheval.
Toute la ville de Namur etait illuminee; il n'etait pas une fenetre ou
les belles Francaises ne pussent lire une devise a la louange de leur
reine.
Un palais veritable etait prepare pour la recevoir, et le moindre
appartement etait tendu des plus riches tapisseries de velours, de
satin, ou de toile d'argent couverte de broderies, sur lesquelles
etaient representes des personnages vetus a l'antique. Si bien que l'on
eut dit que ces merveilles appartenaient a quelque grand roi, et non pas
a quelque jeune prince a marier, tel que don Juan d'Autriche. Et notez
bien que la plus riche magnificence avait ete reservee pour la
tenture de la chambre a coucher de la reine. On y voyait representee
admirablement la _Victoire de Lepante_, honneur de don Juan.
Apres une bonne nuit, ou les enchantements de ce voyage apparaissaient
en reve, la reine se leva et, sa toilette etant faite, elle s'en fut
ouir une messe en musique a l'espagnole, avec violons, violes de basse
et trompettes.
Apres la messe, il y eut un grand festin; Marguerite et don Juan etaient
assis a une table a part. Toute l'assemblee en habits magnifiques; dames
et seigneurs dinaient a des tables separees de la table royale, et l'on
vit ce meme Ludovic de Gonzague a genoux aux pieds de don Juan et lui
servant a boire. Ah! tels etaient l'orgueil et le faste de ces princes
espagnols, que meme les princes illegitimes etaient traites comme des
rois.
Ainsi, deux journees se passerent dans les fetes de la nuit et du jour,
pendant que l'on preparait les bateaux qui, par la douce riviere de
Meuse, une suite de frais paysages, devaient conduire jusqu'a Liege la
reine de Navarre. Elle ma
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