trahison du connetable de Bourbon avait
reduite a des proportions si miserables. Ainsi, Catherine de Navarre
est morte a la peine, en se glorifiant d'avoir tant contribue a
l'etablissement de la royaute francaise. Au contraire, Marguerite est
un obstacle aux vastes projets de son maitre et seigneur, marchant a la
conquete du royaume de France. Au moment ou le Bearnais avait besoin de
toutes ses forces, elle cherche a se composer un petit royaume a
son usage personnel, et lorsque enfin Paris ouvre ses portes au roi
victorieux, lorsqu'il est rentre dans le sein de l'Eglise catholique,
le roi cherche en vain la reine sa compagne. La France l'avait deja
oubliee. Elle etait Valois, la France entiere etait Bourbon.
Cependant le nouveau roi de France aspirait au bonheur d'un mariage
regulier. Il avait decide qu'il laisserait son sceptre a des heritiers
legitimes, et il commandait, plus qu'il ne sollicitait, un divorce
devenu necessaire. Helas! en ce moment, la reine Marguerite comprit
enfin dans quel abime elle etait tombee. Elle vit toute l'etendue de
sa peine, et l'incomparable majeste de cette couronne, qui allait etre
encore une fois la premiere entre toutes les couronnes de l'Europe. Et
si profonde, en effet, cette chute apparaissait aux regards du monde
entier, que lorsque la reine infortunee eut consenti au divorce, Henri
IV fut le premier a la prendre en pitie. Son coeur etait bon, autant
que son ame etait grande. Au moment de se separer de cette epouse qu'il
avait prise, eclatante et superbe, en sa dix-huitieme annee, au
milieu des fetes et des perils de tout genre, a la veille de la
Saint-Barthelemy, d'abominable memoire, il revit d'un coup d'oeil toute
sa jeunesse ecoulee; tant de grace, de devouement, de charme enfin,
lui revinrent en memoire, et il se prit a pleurer sur les ruines de ce
mariage accepte sous de si tristes auspices.
"O malheureuse Marguerite! s'ecriait le bon sire, il fallait donc que
nous en vinssions a cette separation, apres avoir partage tant de
perils, tant d'illustres aventures, et de si beaux jours! Et j'en
atteste ici Dieu lui-meme, il n'a pas tenu que de moi qu'elle ne fut
reine de France a mon cote, mais elle n'a pas voulu m'obeir et me
servir." Ainsi fut prononce le divorce.
Voyez cependant l'inconstance et le changement d'un esprit futile et
primesautier! Sitot qu'elle eut renonce aux esperances d'un si beau
trone, la reine Marguerite ressentit un desir invincible de revoir la
Fra
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