e vous aide a monter."
Les enfants etaient deja au sommet, poussant des cris de joie et
appelant les retardataires, le pauvre general suait a faire pitie.
"Ce n'est pas etonnant, disait-il, je remorque Derigny, qui a encore
plus chaud que moi."
C'est que Derigny avait fort a faire en se mettant a la remorque du
general, qu'il poussait de toute la force de ses bras. C'etait un poids
de deux cent cinquante livres qu'il lui fallait monter par une pente
raide, herissee de rochers, bordee de trous remplis de ronces et
d'epines. Romane l'aidait de son mieux, mais le general y mettait de
l'amour-propre; se sentant soutenu par Derigny, qu'il croyait soutenir,
il refusait l'aide que lui offraient tantot Romane, tantot Natasha.
Enfin, on arriva en haut du plateau; la vue etait magnifique, les
enfants battaient des mains et couraient de cote et d'autre. Le general
triomphait et regardait fierement Derigny, dont le visage inonde de
sueur temoignait du travail qu'il avait accompli. Mais le triomphe du
general fut calme et silencieux. Il ne pouvait parler, tant sa poitrine
etait oppressee par ses longs efforts. Natasha et Romane contemplaient
aussi en silence le magnifique aspect de cette vallee, couronnee de bois
et de rochers, animee par la ville d'Ems et par le ruisseau serpentant
borde de prairies et d'arbustes.
"Que cette vue est belle et charmante! dit Natasha.
--Et que de pensees terribles du passe et souriantes pour l'avenir elle
fait naitre en moi! dit Romane.
--Et quel diable de chemin pour y arriver! dit le general. Voyez
Derigny! il n'en peut plus. Sans moi, il ne serait jamais arrive! ...Il
fait bon ici, ajouta-t-il. Derigny et moi, nous allons nous reposer sur
cette herbe si fraiche, pendant que vous continuerez a parcourir le
plateau."
Le general s'assit par terre et fit signe a Derigny d'en faire autant.
"Je regrette de ne pas avoir mes cigares, dit-il, nous en aurions fume
chacun un; il n'y a rien qui remonte autant.
--Les voici, mon general, dit Derigny en lui presentant son
porte-cigares et une boite d'allumettes.
--Vous pensez a tout, mon ami, repondit le general, touche de cette
attention. Prenez-en un et fumons... Eh bien, vous ne fumez pas?"
Derigny:"Mon general, vous etes bien bon..., mais je n'oserais pas...,
Je ne me permettrais pas...
Le general: "D'obeir, quand je vous l'ordonne? Allons, pas de
resistance, mon ami. Je vous ordonne de fumer un cigare, la..., pres de
moi." Derign
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