e"corbeau"
de droite qui soutient la terrasse en encorbellement. Larsan, qui
prevoyait tout et qui songeait a tous les moyens de fuite autour
de sa chambre -- chose necessaire quand on joue son jeu -- avait
enfonce prealablement cette cheville dans ce "corbeau". Un pied
sur la borne qui est au coin du chateau, un autre pied sur la
cheville, une main a la corniche de la porte du garde, l'autre
main a la terrasse, et Frederic Larsan disparait dans les airs...
d'autant mieux qu'il est fort ingambe et que, ce soir-la, il
n'etait nullement endormi par un narcotique, comme il avait voulu
nous le faire croire. Nous avions dine avec lui, monsieur le
president, et, au dessert, il nous joua le coup du monsieur qui
tombe de sommeil, car il avait besoin d'etre, lui aussi, endormi,
pour que, le lendemain, on ne s'etonnat point que moi, Joseph
Rouletabille, j'aie ete victime d'un narcotique en dinant avec
Larsan. Du moment que nous avions subi le meme sort, les soupcons
ne l'atteignaient point et s'egaraient ailleurs. Car, moi,
monsieur le president, moi, j'ai ete bel et bien endormi, et par
Larsan lui-meme, et comment! ... Si je n'avais pas ete dans ce
triste etat, jamais Larsan ne se serait introduit dans la chambre
de Mlle Stangerson ce soir-la, et le malheur ne serait pas arrive!
..."
On entendit un gemissement. C'etait M. Darzac qui n'avait pu
retenir sa douloureuse plainte...
"Vous comprenez, ajouta Rouletabille, que, couchant a cote de lui,
je genais particulierement Larsan, cette nuit-la, car il savait ou
du moins il pouvait se douter "que, cette nuit-la, je veillais"!
Naturellement il ne pouvait pas croire une seconde que je le
soupconnais, lui! Mais je pouvais le decouvrir au moment ou il
sortait de sa chambre pour se rendre dans celle de Mlle
Stangerson. Il attendit, cette nuit-la, pour penetrer chez Mlle
Stangerson, que je fusse endormi et que mon ami Sainclair fut
occupe dans ma propre chambre a me reveiller. Dix minutes plus
tard Mlle Stangerson criait a la mort!
-- Comment etiez-vous arrive a soupconner, alors, Frederic Larsan?
demanda le president.
-- "Le bon bout de ma raison" me l'avait indique, m'sieur le
president; aussi j'avais l'oeil sur lui; mais c'est un homme
terriblement fort, et je n'avais pas prevu le coup du narcotique.
Oui, oui, le bon bout de ma raison me l'avait montre! Mais il me
fallait une preuve palpable; comme qui dirait: "Le voir au bout de
mes yeux apres l'avoir vu au bout de ma rais
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