et le pere nourricier, etaient venues se grouper autour de
lui. D'une probite reconnue, affable et obligeant pour tous, il avait su
s'attirer l'estime et le respect de chacun d'eux.
Tout le monde connait nos etablissements de pecheries, dans le bas
du fleuve; rien de plus amusant que de voir ces berges aux voiles
deployees, rentrer le soir, apres le rude travail de la journee; ces
femmes, ces enfants accourir pour aider le mari, le pere ou le frere; le
Poste est alors tout en emoi tout le monde se met gaiement a la besogne,
on s'assiste, on se prete un mutuel secours: c'est un plaisir d'entendre
les joyeux propos, les quolibet qui pleuvent sur les pecheurs
malheureux, les gai refrains; enfin, d'etre temoin de la bonne harmonie
qui regne parmi eux. C'est la bonne vieille Gaiete Gauloise qui prend
ses ebats. Telle etait la Grace de Monsieur St.-Aubin.
Sa maison, situee sur une legere eminence, dominait la petite baie et
les cotes avoisinantes. De jolis jardins, de charmants bocages et de
coquets pavillons l'entouraient. Un peu plus loin, la vue pouvait
s'etendre sur de beaux champs, dans un etat de culture deja avancee, et
ou paissaient de nombreux troupeaux: enfin, dans son ensemble et meme
dans ses details, tout respirait l'aisance, la prosperite et le bonheur.
L'interieur de la famille ne presentait rien de particulier. M.
St.-Aubin, marie, depuis quelques annees, a une femme de sa nation,
qu'il aimait tendrement, etait pere d'une charmante petite fille. Cette
enfant etait venu mettre le comble a la felicite de ce couple fortune.
Madame St.-Aubin etait une de ces femmes d'elite, qui semblent se faire
un devoir de rendre heureux tous ceux qui les entourent. Douee des plus
riches qualites du coeur et de l'esprit, elle n'etait que prevenance,
amour et sollicitude pour son mari et sa chere petite Hermine, les
confondant tous deux dans une meme et touchante tendresse. Si parfois
elle pouvait leur derober un instant, dans la journee, c'etait pour
aller porter quelques secours, quelques consolations a ceux qui en
avaient besoin, aussi la regardait-on comme une veritable Providence. Le
soir amenait les intimes causeries, l'on se faisait part des impressions
de la journee, on formait de nouveaux projets pour l'avenir. Bien
souvent aussi, la maman racontait au papa emu, les mille petites
espiegleries de la petite, les conversations qu'elle avait eues avec sa
poupee, voire meme avec une table, une chaise, un meuble quelcon
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