'affaisser dans un fauteuil qu'on lui presenta. Mais rarement les
secousses de la joie inesperee, qu'on eprouve soudainement, produisent
de facheux resultats, aussi, grace aux soins qu'on lui prodigua, fut-il
bientot remis.
En ouvrant les yeux, il vit tout autour du lui les figures de ces bons
sauvages inondees de larmes, et il sentit sur ses joues les baisers
brulants de son enfant. Enfin aux pleurs succederent la joie et le
bonheur. Toute la petite tribu qui avait adoptee Hermine comme une des
leurs, qui lui avait montre toute espece de bontes et de prevenances,
fut invitee a une grande fete.
Apres le repas, M. St.-Aubin distribua a chacun des hommes et des femmes
de riches presents; de sorte que, outre la satisfaction d'avoir fait une
bonne action, ils partirent enchantes de la munificence de leur hote.
Jean Renousse et sa femme ne purent se decider a abandonner leur enfant.
Desormais, d'ailleurs, leur place etait marquee pour toujours a cote de
M. St.-Aubin et d'Hermine.
VIII
Mais il est temps que nous revenions a Madame St.-Aubin. Comme nous
l'avons dit deja, elle fut recueillie en touchant le rivage par un
pauvre pecheur qui la transporta, plus morte que vive, dans sa cabane.
Les soins intelligents et prolonges qu'ils lui donneront, la rappelerent
a la vie. Mais sa raison avait ete ebranlee par les terribles evenements
que nous avons rapportes.
Elle fut longtemps avant, que de pouvoir se remettre des commotions
qu'elle avait eprouvees. Souvent dans la journee et meme la nuit elle
echappait aux mains des braves gens qui l'avait recueillie, s'elancait
vers la plage, puis alors dans le silence et les tenebres on entendait
une voix demander avec desespoir a la vague de lui rendre son enfant.
Quelquefois elle l'implorait d'un ton suppliant; ses paroles etaient
entrecoupees par moments par des sanglots a fendre l'ame; d'autres fois
par des chants! tristes, si plaintifs, qu'on ne pouvait les entendre
sans verser des larmes.
Ce spectre que nous avons vu dans le premier chapitre de ce recit, le
lecteur le voit; c'etait Madame St.-Aubin.
Plusieurs semaines se passerent ainsi et jamais dans le foyer ou elle
etait venue s'asseoir on ne songea a se demander si elle etait une
nouvelle charge pour la famille; bien au contraire, le meilleur morceau,
et il etait rare qu'il en entra dans cette pauvre cabane, lui etait
toujours destine, gaiement on partageait la tranche de pain, laissant a
la pauvre dame, comme on ap
|