ousse, d'avoir pris soin de cette enfant qui parait tant
l'aimer; sans doute que tu l'auras recueillie dans quelque pauvre
famille denuee de tout.
Puis il s'eloigna sans attendre la reponse pour aller servir quelques
commandes.
La jeune fille s'approcha du comptoir, elle examina quelques
marchandises.
--Oh! c'est beau, bien beau, monsieur, ce que vous vendez la.
--Oui, mon enfant, lui repondit-il, en la regardant encore fixement; on
eut dit que ses traits lui rappelaient quelques douloureux souvenirs.
--De quelle paroisse etaient tes parents, petite? lui dit-il.
--Mes parents, lui repondit-elle, avec une douce empreinte de tristesse,
je ne les ai presque pas connus, ils n'etaient pas de ce pays-ci, ils
demeuraient autrefois dans l'Acadie.
--Et que sont-ils devenus? demanda M. St.-Aubin, emu a ce seul nom.
--Ils sont morts, lui repondit-elle.
--Pauvre enfant, dit celui-ci, en essuyant, deux larmes qui roulaient
sur ses joues, et il retourna dans un autre endroit du magasin.
Un instant apres il revint; on eut dit qu'il y avait un sentiment
instinctif qui le ramenait aupres d'elle. Peut-etre aussi pensa-t-il en
lui-meme, cette jeune fille a-t-elle ete une des victimes des malheurs
qui sont venus fondre sur mes malheureux compatriotes.
--Et moi aussi je suis de l'Acadie; est-ce que celui que tu appelles ton
ami est natif de cet endroit?
--Oui, repondit la jeune fille, du plus loin que mon souvenir peut se
reporter, il me semble encore le revoir;
--Et quel est donc son nom?
--Il s'appelle Jean Renousse.
--Jean Renousse? repeta M. St.-Aubin en palissant.
--Et toi quel est donc ton nom?
--Hermine, repondit la jeune fille.
--Hermine! repeta M. St.-Aubin, en s'eloignant; mais non, non,, c'est
impossible. Oh! ta Providence ne peut ainsi se jouer du coeur des,
hommes.
Il revint, aupres de la jeune fille.
--Mais ou donc se trouve-t-il, que je le voie et lui parle?
--Le, voici qui entre, dit Hermine.
Effectivement! en entrant, Jean Renousse reconnut M. St.-Aubin.
--M. St.-Aubin!
--Jean Renousse!
Telles furent les seules paroles qu'ils purent dire, et ils tomberent
dans les bras l'un de l'autre.
Alors Jean 'Renousse poussa la jeune fille vers M. St.-Aubin en
s'ecriant: "Chere enfant, embrasse ton pere." En entendant ces paroles,
celui-ci sentit comme un ocean de joie et de bonheur, depuis longtemps
inconnu, l'inonder tout entier, et chancelant comme un homme ivre, il
alla s
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