ivateurs aises et paisibles, qui n'avaient jamais
quitte leurs villages, ou ils vivaient encore heureux la veille, jetes
maintenant au milieu de l'Ocean, seuls, denues de tout, entoures
d'ennemis, sans avenir et sans espoir! On dit que quelques-uns, dans
cette triste extremite, se rendirent maitres de leurs batiments et se
refugierent sur les cotes sud d'Acadie ou dans les iles du golfe St.
Laurent; mais il est certain que le plus grand nombre fut ramene des
cotes d'Amerique en Angleterre ou ils furent retenus prisonniers a
Bristol et a Exeter jusqu'a la fin de la guerre."
Transfere en Angleterre, M. St.-Aubin y endura toutes les souffrances
physiques et morales qu'un homme peut eprouver. denue de tout, les
privations qu'il endura pendant quelque temps, n'etaient pourtant rien
en comparaison de ce qu'il ressentait au souvenir constant de sa femme
et de son enfant. Il put un bon jour, grace au secours d'un ami qu'il
rencontra providentiellement, obtenir la permission de revenir en
Amerique. Ce fut en qualite de matelot qu'il traversa dans un navire, se
dirigeant vers Boston. Le trajet qu'il lui restait a faire etait bien
long, et certes le salaire d'un pauvre matelot etait loin d'etre
suffisant pour subvenir aux frais d'un voyage qui devait le conduire
de la a son ancienne colonie, ou il esperait retrouver sa femme et
son enfant. Il l'entreprit cependant, marchant autant que ses forces
pouvaient le lui permettre, de temps a autre, louant une pauvre berge
de pecheur et se faisant conduire d'une distance a l'autre. Combien le
trajet lui parut long. Mais revoir les objets cheris dont il avait ete
separe depuis deja 18 mois; cette seule pensee lui donnait des nouvelles
forces. Enfin il arriva, un soir, a l'endroit ou etait sa demeure, mais,
helas! quelle poignante deception! il n'y avait plus que des ruines.
Un etranger a la tete d'un bon nombre d'ouvriers s'occupait a faire
reconstruire de nouvelles habitations, car desormais le poste lui
appartenait.
Et sa femme! sa femme et son enfant! qu'etaient-elles devenues? Ce fut
la qu'on lui apprit le nom du batiment dans lequel elles s'etaient
embarquees pour le Canada. Il s'empressa de se rendre dans ce pays pour
tacher de les y joindre; mais en y arrivant, il apprit le desastre du
"Boomerang", et que la seule personne survivante du naufrage, etait
une pauvre miserable folle qui vivait de la charite publique. Rien ne
pouvait, d'apres les renseignements qu'il put obtenir, lui f
|