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devait y avoir pour cela un secret, un langage particulier, quelque mystere plein de peril et de charme. Elle n'avait jamais lu qu'un roman, j'ignore quel en etait le titre; c'etait un volume depareille qu'elle avait trouve dans le grenier de son pere; il y etait question d'un brigand sicilien qui enlevait une religieuse, et il s'y trouvait bien quelques phrases inintelligibles qu'elle avait jugees devoir etre des paroles d'amour; mais elle avait entendu dire au cure que tous les romans n'etaient que des sottises, et c'etait la verite seule qu'elle brulait de connaitre; mais a qui oser la demander? La chambre de Gaston, a la Honville, n'etait plus si pres qu'a Paris. Plus de coups d'oeil furtifs, plus de bruits d'espagnolette. Tous les jours, a cinq heures du matin, la cloche resonnait faiblement. C'etait le garde-chasse qui reveillait Gaston, la cloche se trouvant pres de sa fenetre. Le jeune homme se levait et partait pour la chasse. Cachee derriere sa persienne, Margot le voyait, entoure de ses chiens, le fusil au poing, monter a cheval et se perdre dans le brouillard qui couvrait les champs. Elle le suivait des yeux avec autant d'emotion que si elle eut ete une chatelaine captive dont l'amant partait pour la Palestine. Il arrivait souvent que Gaston, au lieu d'ouvrir le premier echalier, le faisait franchir a son cheval. Margot, a cette vue, poussait des soupirs ignores, mais a la fois bien doux et bien cruels. Elle se figurait qu'a la chasse on courait les plus grands dangers. Quand Gaston rentrait le soir, couvert de poussiere, elle le regardait des pieds a la tete pour s'assurer qu'il n'etait point blesse, comme s'il fut revenu d'un combat; mais, lorsqu'elle le voyait tirer de son carnier un lievre ou une couple de perdrix, et les deposer sur la table, il lui semblait voir un guerrier vainqueur charge des depouilles de l'ennemi. Ce qu'elle craignait arriva un jour: Gaston, en sautant une haie, fit une chute de cheval; il tomba au milieu des ronces, et en fut quitte pour quelques egratignures. De quelles poignantes emotions ce leger accident fut la cause! La prudence de Margot faillit l'abandonner; elle fut d'abord pres de se trouver mal. On la vit joindre les mains et prier tout bas: que n'eut-elle pas donne pour avoir la permission d'essuyer le sang qui coulait sur la main du jeune homme! Elle mit dans sa poche son plus beau mouchoir, le seul en sa possession qui fut brode, et elle attendait impatiemment quel
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