de la cabane de mousse sur le haut de la
montagne. Cette critique la surprit et l'affligea en meme temps, car
elle en comprit la justesse et sentit que tout ce qu'elle avait fait
jusque la, et qui lui avait paru si beau, n'etait en effet qu'une
tentative manquee. Mais elle se revolta contre cette decouverte,
defendit avec chaleur ses petites creations et accusa les hommes de
voir tout en grand, et de vouloir convertir un simple amusement en
oeuvre importante et dispendieuse. Emue, embarrassee, contrariee meme,
elle ne voulait ni renoncer a ce qui etait fait, ni rejeter ce qu'on
aurait du faire.
La fermete naturelle de son caractere ne tarda pas a venir a son
secours, elle renonca aux travaux projetes et interrompit tous ceux
qui etaient commences. Reduite a l'inaction par ce sacrifice, elle en
souffrit d'autant plus, que les hommes la laissaient presque toujours
seule pour s'occuper des vergers, des jardins et des serres, pour
aller a la chasse ou faire des promenades a cheval, pour acheter ou
troquer des equipages, essayer ou dresser des chevaux. Ne sachant plus
comment occuper ses heures d'ennui, la pauvre Charlotte etendit ses
correspondances, dont au reste le Capitaine etait souvent l'objet;
car elle continuait a demander pour lui a ses nombreux amis et
connaissances un emploi convenable.
Elle etait dans cette disposition d'esprit, lorsqu'elle recut une
lettre detaillee du pensionnat, sur les progres merveilleux de la
brillante Luciane. Cette lettre etait suivie d'un _post-scriptum_
d'une sous-maitresse, et d'un billet d'un des professeurs de la
maison. Nous croyons devoir inserer ici ces deux pieces.
POST-SCRIPTUM DE LA SOUS-MAITRESSE.
Pour ce qui concerne Ottilie, je ne puis que vous repeter, Madame, ce
que j'ai deja eu l'honneur de vous apprendre sur son compte. Je ne
voudrais pas me plaindre d'elle, et cependant il m'est impossible de
dire que j'en suis satisfaite. Elle est, comme toujours, modeste et
soumise; mais cette modestie, cette soumission ont quelque chose qui
choque et deplait. Vous lui avez envoye de l'argent et des etoffes; eh
bien! tout cela est encore intact. Ses vetements lui durent un temps
infini, car elle ne les change que lorsque la proprete l'exige. Sa
trop grande sobriete me parait egalement blamable. Il n'y a rien de
superflu sur notre table, mais j'aime a voir les enfants manger avec
plaisir, et en quantite suffisante, des mets sains et nourrissants.
Jamais Ottilie ne nous a don
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