drame. Je pris un vieux catechisme, oublie
a bord par un marin, je lus les Litanies de la sainte Vierge, et je
promis alors solennellement d'abjurer aussitot arrive en France et de
me faire baptiser.
A huit heures, apparut devant Malaga un steamer; malgre le
decouragement de tous les matelots de l'equipage et contre leur avis,
je fis mettre le pavillon en berne et jeter a la mer une bonbonne
renfermant une demande de secours; je la placai sous la protection de
la Vierge. La bouteille arriva a terre, puis le steamer disparut au
large.
Ce fut alors parmi l'equipage un cri d'immense douleur: toute
esperance s'evanouissait... Pour moi, j'esperais quand meme, priant,
sondant l'horizon avec une longue-vue. Je promis un _ex-voto_ a
Notre-Dame de la Salette et a trois autres pelerinages. Toutefois, je
me preparai a mourir catholique et j'en placai la declaration ecrite
de ma main sur ma poitrine.
Tout a coup, vers dix heures, je decouvre une fumee noire dans le
lointain: j'entends un coup de sifflet strident, et, au milieu des
vagues enormes qui nous couvraient, le steamer qui apparaissait. Le
navire sauveur, detachant sa grande chaloupe, nous envoie vingt-quatre
hommes. Apres des peines inouies, plusieurs fois sur le point d'etre
engloutis, ces braves finissent par nous accoster. Il etait temps;
nous allions attendre la mort dans la mature elevee, car notre
vaisseau etait sur le point de s'entr'ouvrir. On sacrifia les ancres,
les chaines, etc., il fallait se hater.
Le brave capitaine Corno, malgre une mer epouvantable, manoeuvra
tellement bien avec son enorme steamer, qu'a midi il nous amenait dans
le port. Nous etions sauves, grace a la sainte Vierge. Par une faveur
providentielle, le navire et la cargaison n'avaient aucune avarie.
Aussitot a terre, je me rendis a la cathedrale pour remercier Dieu et
Notre-Dame et renouveler ma promesse d'abjuration. En attendant que je
puisse la realiser, j'apprends ma religion dans un vieux catechisme
oublie a bord..."
* * * * *
48.--LA MORT D'UN SEPTEMBRISEUR.
Vers le milieu de l'annee 1826, un homme du peuple, alors sexagenaire,
tenait le petit hotel de Dijon, au n deg. 211 de la rue Saint-Jacques, a
Paris. Atteint depuis longtemps d'une maladie grave, il avait en vain
appele a son secours les plus celebres medecins de la capitale: le mal
n'avait fait qu'empirer avec les annees; enfin, de violents acces de
colere, auxquels il se l
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