eux dans ce
temps-la?--Oui, Monsieur, me repondit-il d'une voix emue; et au meme
instant je vis deux grosses larmes couler sur ses joues. Je lui pris
les mains.--Et pourquoi etiez-vous heureux alors, sinon parce que vous
etiez pur, chaste, aimant et craignant Dieu, en un mot, bon chretien?
Mais ce bonheur peut revenir encore, et le bon Dieu n'a pas change! Il
continuait a pleurer: N'est-ce pas, ajoutai-je, que vous voulez bien
vous confesser?
--Oui, Monsieur, dit-il alors avec force; et il s'avanca vers moi pour
m'embrasser. Je le fis de grand coeur, comme vous pouvez penser, et je
lui donnai quelques petits conseils pour faciliter l'execution de son
bon dessein. Je le quittai ensuite, et j'annoncai a la Soeur le succes
inespere de ma visite. Je ne sais ce qui s'ensuivit; mais ce qui m'est
reste profondement grave dans l'esprit ou plutot dans le coeur, c'est
la force merveilleuse de la misericorde de Dieu, qui changea en un
instant, et a l'aide d'une seule parole, ce coeur si endurci!
Le seul souvenir de sa premiere communion suffit pour convertir et
probablement pour sauver ce pauvre malade, heureux de l'avoir bien
faite; car s'il eut accompli, comme plusieurs, helas! avec negligence,
ce grand acte de la vie chretienne, le souvenir que je lui en
rappelai n'eut fait sans doute sur son coeur qu'une impression
insignifiante!...
Ainsi le bien produit le bien, et avec Dieu rien ne demeure perdu.
* * * * *
53.--L'ORPHELINE ET LE VETERAN.
Une pauvre orpheline avait ete recueillie par un vieux soldat qu'elle
nommait son pere. D'une piete simple, mais serieuse, elle s'etait
attire une telle estime, qu'il y avait autour d'elle comme une aureole
de veneration. Le vieux soldat lui-meme s'etait laisse prendre a son
influence. Il appelait sa petite orpheline, _sa petite sainte_.
Jamais il ne fumait devant elle, il jurait encore moins.
La pieuse enfant etait arrivee a faire prier son pere adoptif, ce
qu'il n'avait pas fait depuis longtemps.
Un jour qu'il passait devant l'eglise du village, je ne sais quelle
inspiration secrete le pousse a y entrer. Il va s'agenouiller dans un
coin et commence son signe de croix. Mais tout a coup il s'arrete, ses
yeux ont rencontre une enfant qui, recueillie au pied de l'autel, les
mains jointes, parait comme dans une extase. Il regarde, il reconnait
sa fille. La pensee lui vient aussitot qu'elle demande a Dieu sa
conversion; elle lui a dit tant
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