irer a cette
gloire toute mondaine. Loin de viser a l'effet, elle attenue
volontairement celui qu'elle produit. Comme elle amortit l'eclat de ses
regards, elle modere son style et tempere son esprit. Elle sacrifie les
qualites brillantes aux qualites solides; trop d'imagination, trop de
verve l'effrayerait. Saint-Cyr ne doit pas ressembler aux hotels d'Albret
ou de Richelieu; on ne doit point parler a des religieuses comme a des
precieuses.
L'enjouement, la verve gauloise, la gaiete de bon aloi, sont du cote de
Mme de Sevigne; l'experience, la raison, la profondeur, sont du cote de
Mme de Maintenon. L'une rit a gorge deployee; l'autre sourit a peine.
L'une a des illusions sur toutes choses, des admirations qui vont jusqu'a
la naivete, des extases en presence des rayons de l'astre royal; l'autre
ne se laisse fasciner ni par le roi, ni par la cour, ni par les hommes, ni
par les femmes, ni par les choses. Elle a vu de trop pres et de trop haut
les grandeurs humaines pour ne pas en comprendre le neant, et ses
conclusions sont empreintes d'une tristesse profonde. Mme de Sevigne a
bien aussi parfois des atteintes de melancolie; mais le nuage passe vite,
et l'on se retrouve en plein soleil. La gaiete, gaiete franche,
communicative, rayonnante, fait le fond du caractere de cette femme
spirituelle, seduisante, amusante. Mme de Sevigne, brille par
l'imagination, Mme de Maintenon par le jugement. L'une se laisse eblouir,
enivrer; l'autre garde toujours son sang-froid. L'une s'exagere les
splendeurs de la cour; l'autre les voit telles qu'elles sont. L'une est
plus femme; l'autre est plus matrone.
XIII
LA VIEILLESSE DE MME DE MONTESPAN
C'est dans son orgueil qu'est presque toujours puni quiconque a peche par
orgueil. De toutes les favorites de Louis XIV, Mme de Montespan avait ete
la plus despotique et la plus hautaine; ce fut aussi la plus humiliee. Ne
pouvant s'habituer a sa decheance, elle resta pres de onze ans a la cour,
bien qu'elle fut devenue a charge au roi et a elle-meme. "On disait
qu'elle etait comme ces ames malheureuses qui reviennent dans les lieux
qu'elles ont habites expier leurs fautes[1]." Malgre la demi-conversion de
cette fiere Mortemart, il lui restait encore des vestiges de colere et
d'ironie. Allant un jour chez Mme de Maintenon, elle y rencontra le cure
de Versailles et les soeurs grises, qui venaient assister a une reunion de
charite:
[Note 1: _Souvenirs de Mme de Caylus_.]
"Savez-vo
|