[Note 1: Voir l'interessante correspondance de la duchesse de Bourgogne et
de sa soeur la reine d'Espagne, femme de Philippe V, publiee, avec une
tres bonne preface de Mme la comtesse Della Rocca, chez Michel Levy
(1 vol.)]
"Jugez dans quelle inquietude je suis sur tout ce qui vous arrive, vous
aimant fort tendrement, et ayant toute l'amitie possible pour mon pere, ma
mere et mes freres. Je ne puis les voir dans une situation aussi
malheureuse sans avoir les larmes aux yeux... Je suis dans une tristesse
qu'aucun amusement ne peut diminuer, et qui ne s'en ira, ma chere
grand'mere, qu'avec vos malheurs... Mandez-moi des nouvelles de tout ce
qui m'est le plus cher au monde.[1]"
[Note: 1 Marie-Jeanne-Baptiste, dite Madame Royale, fille de
Charles-Amedee de Savoie-Nemours et d'Elisabeth de Vendome, epousa en 1665
le duc de Savoie, Charles-Emmanuel II, pere de Victor-Amedee II.]
La duchesse de Bourgogne souffrait en meme temps des desastres de ses deux
patries, la Savoie et la France.
"Faites-nous des saintes pour nous obtenir la paix," disait Mme de
Maintenon aux religieuses de Saint-Cyr.
La duchesse, comme le remarque La Beaumelle, montrait, dans les
circonstances perilleuses ou se trouvait le pays, "la dignite de la
premiere femme de l'Etat, les sentiments d'une Romaine pour Rome et les
agitations d'une ame qui veut le bien avec une ardeur qui n'est pas de son
age." L'heure des grandes tristesses etait venue. Comme l'a tres bien dit
M. Capefigue: "Le temps difficile, pour un roi puissant et heureux, c'est
la vieillesse. Si la tete reste ferme, le bras faiblit, les guirlandes
fletrissent, les lauriers meme prennent une teinte de grisaille. On vous
respecte encore, mais on ne vous aime plus; les chapeaux coquets a plumes
Flottantes font ressortir les rides de la figure et les plis du front; le
jonc a pomme d'or n'est plus une facon de sceptre, mais un baton qui
soutient les jambes faibles et un corps voute." Pour la duchesse de
Bourgogne, Louis XIV vieilli conservait son prestige. Elle l'aimait
sincerement.
"Le public, dit Mme de Caylus, a de la peine a concevoir que les princes
agissent simplement et naturellement, parce qu'il ne les voit pas d'assez
pres pour en bien juger, et parce que le merveilleux qu'il cherche
toujours ne se trouve pas dans une conduite simple et dans des sentiments
regles. On a donc voulu croire que la duchesse ressemblait a son pere, et
qu'elle etait, des l'age de onze ans qu'elle vin
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