dont il avait tant de fois entendu prononcer le nom. Il lui fit demander
par un interprete si elle etait malade. Elle repondit que oui. Il voulut
savoir quel etait son mal:
"Une grande vieillesse," repliqua-t-elle.
Mme de Maintenon mourut a Saint-Cyr, le 15 avril 1719. Elle demeura deux
jours exposee sur son lit, "avec un air si doux et si devot qu'on eut dit
qu'elle priait Dieu[1]."
[Note 1: _Memoires des Dames de Saint-Cyr_.]
On l'ensevelit dans le choeur de l'eglise; une humble plaque de marbre
indiqua l'emplacement ou son corps reposait. C'est la que les novices
allaient prier avant de se vouer pour toujours au Seigneur.
Au moment de quitter ces femmes celebres, dont nous avons essaye d'evoquer
les ombres gracieuses, descendons dans les cryptes ou elles sont
ensevelies. Mlle de La Valliere repose a Paris, dans la chapelle des
Carmelites de la rue Saint-Jacques; la reine Marie-Therese, les deux
duchesses d'Orleans, la dauphine de Baviere, la duchesse de Bourgogne, a
Saint-Denis. C'est la qu'il faut aller mediter, la qu'il faut ecouter la
grande parole chretienne: _Memento, homo, quia pulvis es et in pulverem
reverteris_.
Bossuet dit, en parlant des Pharaons, qu'ils ne jouirent pas de leur
sepulcre. Telle devait etre la destinee de Louis XIV. Ce potentat, qui
avait donne des lois a l'Europe, ne posseda pas meme son tombeau. Les
profanateurs de cercueils descendirent dans le souterrain des "princes
aneantis", et malgre son arriere-garde de huit siecles de rois, comme dit
Chateaubriand, la grande ombre de Louis XIV ne put pas defendre la majeste
de sepulcres que tout le monde aurait crus inviolables.
Dans la seance du 31 juillet 1793, Barere lut a la Convention, au nom du
Comite de salut public, un long rapport dans lequel il demandait que, pour
feter l'anniversaire de la journee du 10 aout, l'on detruisit les
mausolees de Saint-Denis.
"Sous la monarchie, disait-il, les tombeaux memes avaient appris a flatter
les rois; l'orgueil et le faste royal ne pouvaient s'adoucir sur ce
theatre de la mort, et les porte-sceptre qui ont fait tant de maux a la
France et a l'humanite semblent encore, meme dans la tombe, s'enorgueillir
d'une grandeur evanouie. La main puissante de la Republique doit effacer
impitoyablement ces mausolees, qui rappelleraient des rois l'effrayant
souvenir."
La Convention rendit par acclamation un decret conforme a ce rapport.
Considerant que "la patrie etait en danger et manquait de ca
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