II,
pages 336-350), cite un ouvrage manuscrit francais qui est une apologie
remarquable de l'illustre Florentin, et il se dit tente de l'attribuer
a Gabriel Naude. Mais, sans parler des autres objections, comme cette
apologie ne put etre composee que vers ou apres 1649, Naude eut bien
assez a faire, en ces annees, avec son _Mascurat_ d'abord, puis avec les
tracas et calamites qui vont l'envahir, pour qu'on ne puisse lui imputer
un travail dont on ne verrait d'ailleurs pas le but sous sa plume.]
La seconde Fronde vint renverser encore une fois la fortune de Naude
et lui porter au coeur le coup le plus sensible, celui qu'un pere eut
eprouve de la perte d'une fille unique, deja nubile et passionnement
cherie. L'arret du parlement de Paris qui ordonnait la vente de la
bibliotheque du cardinal lui arracha un cri de douleur et presque
d'eloquence. Dans un _Advis_ imprime (1651) a l'adresse de _nos
Seigneurs du Parlement_, il exhale les sentiments dont il est plein:
".....Et pour moi qui la cherissois comme l'oeuvre de mes mains et le
miracle de ma vie, je vous avoue ingenuement que, depuis ce coup de
foudre lance du ciel de votre justice sur une piece si rare, si belle et
si excellente, et que j'avois par mes veilles et mes labeurs reduite a
une telle perfection que l'on ne pouvoit pas moralement en desirer une
plus grande, j'ai ete tellement interdit et etonne, que si la meme cause
qui fit parler autrefois le fils de Cresus, quoique muet de sa nature,
ne me delioit maintenant la langue pour jeter ces derniers accents au
trepas de cette mienne fille, comme celui-la faisoit au dangereux etat
ou se trouvoit son pere, je serois demeure muet eternellement. Et,
en effet, messieurs, comme ce bon fils sauva la vie a son pere en le
faisant connoitre pour ce qu'il etoit, pourquoi ne puis-je pas me
promettre que votre bienveillance et votre justice ordinaire sauveront
la vie a cette fille, ou, pour mieux dire, a cette fameuse bibliotheque,
quand je vous aurai dit, pour vous representer en peu de mots l'abrege
de ses perfections, que c'est la plus belle et la mieux fournie de
toutes les bibliotheques qui ont jamais ete au monde et qui pourront, si
l'affection ne me trompe bien fort, y etre a l'avenir."--Et il finit en
repetant les vers attribues a Auguste, lorsque celui-ci decida de casser
le testament de Virgile plutot que d'aneantir l'_Eneide_:
.... Frangatur potius legum veneranda potestas
Quam tot congestos noctesque diesque
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