chance de faire plaisir aux gens avec tant de
facilite.
J'ai vu les Lambert et je les revois ce soir a l'Odeon, ou je vais
entendre _la Vie de Boheme_, que je ne connais pas.
Minuit.
Je reviens de l'Odeon, ou j'ai pleure comme un Doligny. C'est navrant et
charmant, cette piece. C'est tres bien joue; Thuillier est superbe. J'ai
vu La Rounat, qui a la piece d'Augier, mais pas de Berton pour la jouer;
il est dans tous ses etats. J'y ai vu Cadol, toujours sur la branche, et
tous les grands et petits cabots qui me pleurent. J'ai dit a La Rounat:
"Vous n'avez eu qu'un tort, c'est de ne pas esperer que je pourrais
faire un miracle de volonte et de promptitude, de vous decourager et de
me decourager de vous, en me faisant perdre quinze jours. J'aurais eu
une bonne idee. Je l'ai eue malgre vous; mais, a present, ce n'est pas
pour vous."
Voila comment il ne faut pas jeter le manche apres la cognee; a present
que j'ai de l'experience, je ne me laisse plus depiter ni abattre. J'ai
donc bien fait, cette fois surtout, d'etre philosophe et de ne pas
m'arreter de piocher. Cette piece nous fera beaucoup d'honneur, a ce
que dit Alexandre. Jeudi, je dine chez Magny; grand diner donne par
Demarquay. Tu vois que je fais une vie de Polichinelle. Je me porte
bien; mais j'ai besoin d'avoir plus de nouvelles de vous, plus de
details. Ma Cocote est sur pied en _chambre_; il me tarde de savoir
qu'elle est descendue. Aurore a-t-elle toujours une crise de pleurs le
soir? Si ca a continue, il faut l'ecrire au docteur Darchy.
Tout l'univers me demande de vos nouvelles. Bonsoir, mes enfants.
Je vous _bige_ a mort. J'espere que Cocote va etre contente de mes
nouvelles.
Calamatla est-il parti?
[1] _Les Don Juan de village_.
[2] _Les Don Juan de village_ et _Heloise Paranquet_.
DCI
A MADAME LA COMTESSE SOPHIE PODLIPSKA, A PRAGUE
Palaiseau, 12 fevrier 1866
Je suis vivement touchee, madame, de l'envoi que vous voulez bien me
faire[1] (je ne l'ai recu que depuis quelques jours) et de l'excellente
lettre qui y etait jointe. C'est un honneur pour moi d'etre traduite par
vous, et c'est une douceur que d'etre aimee en meme temps avec tant de
delicatesse et de generosite.
M. Leger a pris la peine de m'envoyer la traduction en francais de votre
interessante preface. Elle m'a reportee au temps deja eloigne ou
je revais les aventures de _Consuelo_, et ou, manquant beaucoup de
renseignements, j'
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