, que son existence etait precaire, et que les
assemblees des communes etaient les seules autorites legales et
puissantes.
"On avait insinue aux autres que les chefs d'opinion dans l'assemblee
nationale avaient des projets perfides, voulaient renverser la liberte et
livrer la republique aux etrangers.
"De sorte qu'un grand nombre de membres du conseil croyaient user d'un
droit legitime lorsqu'ils usurpaient l'autorite, croyaient resister a
l'oppression lorsqu'ils s'opposaient a la loi, croyaient faire un acte de
civisme lorsqu'ils manquaient a leurs devoirs de citoyens: neanmoins, au
milieu de cette anarchie, la commune prenait de temps en temps des arretes
salutaires.
"J'avais ete conserve dans ma place; mais elle n'etait plus qu'un vain
titre; j'en cherchais inutilement les fonctions, elles etaient eparses
entre toutes les mains, et chacun les exercait.
"Je me rendis les premiers jours au conseil; je fus effraye du desordre
qui regnait dans cette assemblee, et surtout de l'esprit qui la dominait:
ce n'etait plus un corps administratif deliberant sur les affaires
communales; c'etait une assemblee politique se croyant investie de pleins
pouvoirs; discutant les grands interets de l'etat, examinant les lois
faites et en promulguant de nouvelles; on n'y parlait que de complots
contre la liberte publique; on y denoncait des citoyens; on les appelait
a la barre; on les entendait publiquement; on les jugeait, on les
renvoyait absous ou on les retenait; les regles ordinaires avaient
disparu; l'effervescence des esprits etait telle, qu'il etait impossible
de retenir ce torrent: toutes les deliberations s'emportaient avec
l'impetuosite de l'enthousiasme; elles se succedaient avec une rapidite
effrayante; le jour, la nuit, sans aucune interruption, le conseil etait
toujours en seance.
"Je ne voulus pas que mon nom fut attache a une multitude d'actes aussi
irreguliers, aussi contraires aux principes.
"Je sentis egalement combien il etait sage et utile de ne pas approuver,
de ne pas fortifier par ma presence tout ce qui se passait. Ceux qui dans
le conseil craignaient de m'y voir, ceux que mon aspect genait, desiraient
fortement que le peuple, dont je conservais la confiance, crut que je
presidais a ses operations, et que rien ne se faisait que de concert avec
moi: ma reserve a cet egard accrut leur inimitie; mais ils n'oserent pas
la manifester trop ouvertement, crainte de deplaire a ce peuple dont ils
briguaient la f
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