d'une revolution qui nous a
tant coute. Dans le cote droit, il y a des membres qui n'ont pas assez de
confiance en vous; mais moi, qui ai ete votre collegue, qui vous connais
pour un honnete homme, pour un ami de la liberte, je leur assure que vous
serez pour nous, que vous nous aiderez de tous les moyens que votre place
met a votre disposition. Est-ce qu'il peut vous rester la plus legere
incertitude sur tout ce que je vous ai dit de ces scelerats?--Je serais
trop indigne de l'estime que vous me temoignez, si je vous laissais penser
que je crois a la verite de tout ce plan, que vous croyez etre celui de
vos ennemis. Plus vous y mettez de faits, de choses et d'hommes, plus il
vous parait vraisemblable a vous; et moins il me le parait a moi. La
plupart des faits dont vous composez le tissu de ce plan ont eu un but
qu'on n'a pas besoin de leur preter, qui se presente de lui-meme, et vous
leur donnez un but qui ne se presente pas de lui-meme, et qu'il faut leur
preter. Or, il faut des preuves d'abord pour ecarter une explication
naturelle, et il faut d'autres preuves ensuite pour faire adopter une
explication qui ne se presente pas naturellement. Par exemple, tout le
monde croit que Lafayette et d'Orleans etaient ennemis, et que c'etait
pour delivrer Paris, la France et l'assemblee nationale, de beaucoup
d'inquietudes, que d'Orleans fut engage ou oblige par Lafayette a
s'eloigner quelque temps de la France; il faut etablir, non par assertion,
mais par preuve, 1. qu'ils n'etaient pas ennemis; 2. qu'ils etaient
complices; 3. que le voyage de d'Orleans en Angleterre eut pour objet
l'execution de leurs complots. Je sais qu'avec une maniere de raisonner
si rigoureuse, on s'expose a laisser courir les crimes et les malheurs
devant soi sans les atteindre et sans les arreter par la prevoyance; mais
je sais aussi qu'en se livrant a son imagination, on fait des systemes sur
les evenemens passes et sur les evenemens futurs; on perd tous les moyens
de bien discerner et apprecier les evenemens actuels, et revant des
milliers de forfaits que personne ne trame, on s'ote la faculte de voir
avec certitude ceux qui nous menacent: on force des ennemis qui ont peu
de scrupules a la tentation d'en commettre, auxquels ils n'auraient jamais
pense. Je ne doute pas qu'il n'y ait autour de nous beaucoup de scelerats:
le dechainement de toutes les passions les fait naitre, et l'or de
l'etranger les soudoie. Mais, croyez-moi, si leurs projets sont affre
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