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la-dessus; mais vous ne m'avez pas entendue, ou vous ne vous souvenez
pas.
--Ah! si, je m'en souviens, dit le fermier consterne, mais j'ai cru que
vous me trompiez.
--Et pourquoi vous tromperais-je? Cet argent n'etait-il pas a moi?
--A vous? Vous ne niez donc pas que je vous ai achete hier soir votre
terre, que je vous l'ai payee et qu'elle m'appartient?
--Comment la pensee vous vient-elle que je sois capable de le nier?
--Ah! pardon, pardon, Madame! je n'ai pas ma tete! dit le fermier abattu
et calme.
--Je le vois bien, dit Marcelle d'un ton de mepris auquel il ne prit pas
sarde.
--C'est egal, la reparation des batiments et le cheptel sont a votre
charge, reprit-il apres un silence pendant lequel ses idees se
confondirent de nouveau.
--De deux choses l'une, monsieur Bricolin, dit Marcelle en levant les
epaules: ou vous n'avez pas achete le domaine, et il m'appartient de
reparer le mal, ou je vous l'ai vendu et je n'ai pas a m'en occuper;
choisissez!
--C'est vrai! dit encore Bricolin tombant dans une nouvelle stupeur.
Puis il reprit bien vite: Oh! je vous l'ai bel et bien achete, paye,
vous ne pouvez pas nier ca! J'ai votre acte qui porte quittance, je ne
l'ai pas laisse bruler, moi! Ma femme l'a dans sa poche.
--En ce cas, vous etes tranquille, et moi aussi, car j'ai aussi le
double de notre acte dans ma poche.
--Mais vous devez supporter le dommage! s'ecria Bricolin avec une
sombre fureur. Je ne vous ai pas achete une terre sans batiment et sans
cheptel. Il y a la une perte de cinquante mille francs, au moins!
--Je n'en sais rien, mais le desastre a eu lieu apres la vente.
--C'est vous qui avez mis le feu!
--C'est tres-probable! dit Marcelle avec un froid mepris, et j'y ai jete
le prix de ma terre pour m'amuser!
--Pardon, pardon, je suis malade! dit le fermier; perdre tant d'argent
dans une nuit!... Mais c'est egal, madame Marcelle, vous me devez une
indemnite pour mon malheur. J'ai toujours eu du malheur avec votre
famille. Mon pere, pour un depot que lui avait fait votre grand-pere,
a ete mis a la torture par les chauffeurs, et a perdu cinquante mille
francs qui etaient a lui.
--Les suites de ce malheur sont irreparables, puisque votre pere y a
perdu la sante de l'ame et du corps. Mais ma famille est fort innocente
du crime des brigands; et quant a la perte de votre argent, elle a ete
largement compensee par mon grand-pere.
--C'est vrai, c'etait un digne maitre! Aussi, vou
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