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l'evolution anterieure de la vie, chez le sujet qu'il examine. Celui-ci
a-t-il eu de grands assauts, et s'est-il ressaisi completement? En ce
cas, c'est une presomption en sa faveur: ce passe prouve qu'il a une
grande elasticite, un capital serieux, et qu'il est possible que, dans
la crise actuelle, il rebondisse encore une fois.--Au contraire n'a-t-il
jamais eu d'assaut important? le probleme devient alors plus difficile,
car le medecin manque d'une base pour apprecier la valeur reelle du
capital. Aussi fera-t-il bien de rester dans une prudente reserve, et
si, dans le cas precedent, il a ete en droit de rassurer la famille
malgre la gravite apparente de l'etat du malade, dans le second cas, au
contraire, il ne doit dire qu'une chose: "Je ne sais pas."
Pour ma part, je me mefie beaucoup des hommes a sante insolente, n'ayant
jamais eu besoin de soins, que je vois brusquement atteints par une
"maladie" accidentelle, par la grippe en particulier. Me trouvant sur
un terrain inconnu, je me demande, tout d'abord, si leur capital etait
aussi bon qu'il le paraissait, et si la grippe ne va pas provoquer la
faillite, la debacle.
Ce sont la, je le repete, des problemes cliniques extremement difficiles
a resoudre; mais ils ont un grand interet au point de vue du pronostic a
porter, et du traitement a instituer. Et cet interet est immediat: car
si le medecin soupconne, chez son malade, une alteration profonde que ne
traduit pas l'ensemble symptomatique, il doit redoubler de precautions,
sa surveillance doit etre incessante, son zele doit prevoir les moindres
incidents, ne rien laisser au hasard. Il a alors a lutter non seulement
contre la "maladie", mais aussi contre le malade, souvent indocile, et
contre les familles, qui trouvent qu'on en fait trop, qu'on prend trop
de soins, que le malade devrait se lever pour regagner des forces,
sortir pour se distraire, reprendre une partie de ses occupations pour
ne pas nuire a sa carriere; estimant, _in petto_, que le medecin userait
de discretion en espacant davantage ses visites, etc. Quoi qu'il arrive,
ce sont de mauvais cas pour le medecin. Il est accuse, si le malade
guerit, d'avoir retarde sa convalescence, et, s'il succombe, de ne
l'avoir pas bien soigne. Car enfin, un homme si bien portant! et qui
succombe a la suite d'une grippe, presque sans fievre! Surement, c'est
le medecin qui est coupable! Il n'a, pour se consoler, que la conscience
du devoir accompli. Et d'ailleurs il
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