nt le garcon qui servait jusqu'a lui faire perdre la
tete.
Il est sur que ni M. de Thaller ni M. Jottras n'avaient grand appetit.
Mais M. Saint-Pavin officiait pour tous, et rien qu'a lui tenir tete
et a lui faire raison, M. Favoral s'animait visiblement.
Il avait la joue fort enluminee, quand, ayant verse a la ronde du vin
de Champagne, il leva son verre couronne de mousse, en s'ecriant:
--Je bois au succes de l'affaire!
--Au succes de l'affaire! repondirent les autres en trinquant...
Et quelques moments apres, on passa au salon pour prendre le cafe.
Ce toast n'avait pas ete sans inquieter Mme Favoral. Mais il lui fut
impossible d'adresser une question, tant vivement elle fut entreprise
par Mme de Thaller, laquelle l'entraina pres d'elle sur le canape,
sous pretexte que deux femmes ont toujours des secrets a echanger,
alors meme qu'elles se voient pour la premiere fois.
La jeune baronne etait de premiere force sur les articles mode et
toilette, et c'est avec une volubilite etourdissante qu'elle demandait
a Mme Favoral le nom de sa couturiere et de sa modiste, et a quel
joaillier elle donnait ses diamants a remonter.
Cela ressemblait si bien a une plaisanterie, que la pauvre menagere
de la rue Saint-Gilles ne pouvait s'empecher de sourire, tout en
repondant qu'elle n'avait pas de couturiere et que n'ayant pas de
diamants, un joaillier lui etait completement inutile.
L'autre declarait n'en pouvoir revenir. Pas de diamants! c'est
un malheur qui depasse tout! Et vite, elle en prenait texte,
charitablement, pour enumerer les parures de son ecrin, les dentelles
de ses tiroirs et les robes de ses armoires. D'abord, il lui eut ete
impossible, elle le jurait, de vivre avec un mari avare ou pauvre. Le
sien venait de lui faire present d'un coupe capitonne de satin jaune
qui etait un bijou. Et certes, elle l'employait, adorant le mouvement.
Elle passait ses journees a courir les magasins et a se promener au
bois. Tous les soirs elle avait, a son choix, le spectacle et le bal,
l'un et l'autre souvent. Les theatres de genre etaient ceux qu'elle
preferait. Assurement l'Opera et les Italiens sont bien plus
distingues, mais elle ne pouvait se tenir d'y bailler...
Puis, elle voulait embrasser les enfants, et il fallait aller
lui chercher Maxence et Gilberte. Elle adorait les enfants,
protestait-elle, c'etait son faible, sa passion. Elle avait,
elle-meme, une petite-fille de dix-huit mois, nomme Cesarine, dont
ell
|