re l'appel de
saint Dominique? Non point; mais la longueur des etudes theologiques
l'effrayait, et surtout la peine que sa decision causerait a sa mere
et l'obligation ou il serait de vivre loin d'elle, car il l'aimait
et l'admirait entre toutes. Enfin, _il etait presse de dire la
messe_--toujours le meme desir sublime de reprendre la place abandonnee.
Et voici qu'on lui disait: "Votre devoir est avant tout le sacerdoce.
Dieu vous veut, provisoirement du moins, parmi les pretres seculiers."
Dans sa ferveur filiale, Ernest Psichari recut ce conseil avec un
debordement de joie: Oui, etre un simple cure de campagne, comme son
grand-pere l'eut ete, vivre dans quelque presbytere tres simple de
basse Bretagne, retourner fidelement, minutieusement, sur les voies
abandonnees et, d'abord, mettre les pas dans les pas, retrouver la
vocation exacte, aller au seminaire...
C'est ainsi qu'au printemps de 1914, Ernest Psichari fit visite au
superieur du grand seminaire d'Issy. Le parc et la chapelle etaient
intacts et tels que Renan les decrit en ses _Souvenirs d'enfance et de
jeunesse_. Il retrouva la froide charmille janseniste du dix-septieme,
les longues allees solitaires, et c'est avec une grande emotion qu'il
vit ces endroits memes ou son "malheureux grand-pere" avait prie.
Quelques semaines plus tard, M. l'abbe Tanquerey, directeur au grand
Seminaire, rencontra le R.P. Janvier et lui dit: "Nous avons recu la
visite du petit-fils de Renan... _Il entrera chez vous._" Il semble
bien, en effet, que ce pelerinage a Issy n'ait fait que confirmer Ernest
Psichari dans son dessein de se donner a saint Dominique. Toujours
est-il que son fremissement interieur ne s'etait pas apaise:
_Ce qui me parait vraiment insupportable, c'est de continuer cette
existence d'oubli et de reniement qui est la mienne, ecrivait-il
alors[36]. Il faudra pourtant un jour que cela change, car Dieu ne se
lassera-t-il pas a la fin de tout donner sans rien recevoir?_
Le P. Clerissac, a qui Psichari faisait cet aveu, finit, apres avoir
longuement hesite, par acquerir la certitude que la vocation de ce jeune
homme etait bien dominicaine. Pour ne rien hater cependant, il fut
convenu qu'Ernest Psichari ne s'engagerait pas immediatement et qu'il
irait d'abord prendre ses grades en theologie a Rome, au College
Angelique, et comme auditeur libre.
NON TOLLIT GOTHUS QUOD CUSTODIT CHRISTUS, SAINT AUGUSTIN
Mais Dieu, lui, savait deja la mission qu'il destinait
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