g de la petite riviere, des etalages sont dresses sous de pauvres
toitures que supportent des pieux, entre lesquels de grossieres etoffes
sont tendues; des gamins et des fillettes s'amusent autour de ces
baraques; quelques-uns barbotent dans l'eau toute claire; d'autres au
fond de la boutique dorment sur de gros sacs; d'autres s'emploient avec
leurs parents a faire l'article aux Albanais qui passent; pour deux
sous, ils vendent une pasteque qui remplit un plat et pour trois sous
des melons odoriferants et murs, qui poussent dans les fermes voisines.
Un peu plus loin, une autre mosquee ferme une large rue ou la
circulation est deja active; la chaussee est bordee de trottoirs faits
de paves inegaux; des maisons basses, de un ou deux etages, ouvrent leur
porte sur la rue meme; des boutiques d'artisans occupent le
rez-de-chaussee; ici, c'est un marchand de sandales, qui travaille la
peau et le cuir; la, un forgeron; plus loin, on fabrique des armes et on
incruste l'argent dans leurs poignees; puis ce sont des selles a vendre,
des ceintures et des vestes brodees, des piles de polos de laine blanche
et des etoffes de couleur; le pays est prospere et le commerce s'en
ressent.
En continuant notre promenade, on me montre la vieille mosquee de Tirana
sans dome ni terre-plein, le toit inegal et les tuiles arrachees;
contre le soubassement de ses portiques les villageois des environs ont
amoncele leurs fruits en d'enormes tas, derriere lesquels ils s'assoient
a la turque et attendent l'acheteur; sous les arbres voisins, les
chevaux et les mulets ont ete attaches et les voitures garees: c'est le
marche aux fruits; poires et raisins, melons et pasteques, figues et
olives, tout pousse dans ce jardin de l'Albanie qu'est la vallee de
Tirana.
Nous sortons de la ville et gagnons un tchiflick proche; le vieux cawas
du consulat nous accompagne: il porte le vetement de quelques vieux
Albanais: sur la culotte, une sorte de grande chemise blanche, a longues
manches, tombe jusqu'aux genoux, serree par une large ceinture; un petit
bolero etroit laisse une large chaine d'argent s'etaler sur la poitrine;
dans la ceinture quelques armes completent le costume: un pistolet a la
crosse de cuivre, un poignard au manche incruste d'argent.
Guides par lui, nous suivons une des routes qui traversent le pont sur
l'Ismi ou se jettent toutes les eaux qui courent a travers les rues de
Tirana. Des marronniers centenaires bordent le chemin et la riviere;
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