saint pretre avait parle apres que sa tete avait
ete separee de son corps. Elle ajoute aussi, M. Le Maitre eut la
tete coupee par les sauvages, le jour de la decollation de saint
Jean-Baptiste, proche Montreal; et l'on rapporte que l'on avait vu sur
son mouchoir, dans lequel on avait emporte sa tete, les traits de son
visage empreints si fortement qu'on pouvait le reconnaitre.
"Quelque temps apres, comme je me disposais pour aller en France, j'eus
la pensee de m'assurer de ce fait, afin que, si on me demandait si cela
etait veritable, je susse ce que je devais en dire. Je fus donc trouver
Lavigne, que l'on avait ramene du pays des Iroquois: car il avait ete
pris et les sauvages lui avaient arrache un doigt. Il me dit que cela
etait veritable, qu'il en etait assure, non pour l'avoir entendu dire,
mais pour l'avoir vu; qu'il avait promis tout ce qu'il avait pu aux
sauvages pour avoir ce mouchoir, les assurant que, quand il serait a
Montreal, il ne manquerait pas de les satisfaire: ce que cependant ils
ne voulurent pas accepter disant que ce mouchoir etait pour eux un
pavillon pour aller en guerre, et qui les rendrait invincibles."
Dans les annales des hospitalieres de Saint-Joseph nous lisons aussi:
"Apres que les Iroquois eurent decapite M. Le Maitre, ils mirent sa tete
dans un mouchoir blanc, qu'apparemment ils avaient pris dans la poche du
defunt, et, l'ayant ainsi emportee dans son pays il arriva une merveille
qui merite d'etre decrite, pour votre edification.
"C'est que la face de ce serviteur de Dieu, et tous les traits de son
visage demeurerent sur la toile de ce mouchoir, en sorte que ceux qui
avaient eu l'avantage de le connaitre pendant sa vie, le reconnaissaient
parfaitement. Ce qu'il y a de particulier, c'est qu'on ne voyait plus de
sang au mouchoir qui etait au contraire tres blanc; mais il paraissait
dessus comme une cire blanche tres fine, qui representait la face
au serviteur de Dieu: ce qui ne peut pas etre arrive naturellement.
Quelques-uns de nos Francais prisonniers dans cette nation le
reconnurent parfaitement. C'est ce que nous ont dit plusieurs fois M. de
Saint-Michel, M. Cuillerier, personnes dignes de foi, ainsi qu'un pere
jesuite, qui etait prisonnier dans ce temps-la, dans une autre nation
que celle qui avait tue ce saint homme. Il nous a dit en avoir oui
parler comme d'une chose tres vraie, quoique il ne l'ait pas vu
lui-meme; et que les sauvages en parlaient les uns aux autres
avec etonne
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