apres lui, et, l'ayant pris, le trainent sur
les rochers la tete et le visage en bas presque tout autour de l'ile.
D'autres, pendant ce temps, tirent sur un bateau et tuent plusieurs
personnes, entre autres deux braves fils de famille: J.-Bte Moyen, age
de 19 ans, et Joseph Duchesne, age de 20 ans, qui, sans faire attention
a ses blessures, exhortait son camarade a bien mourir, quand il tomba
lui-meme raide mort dans le bateau.
M. Vignal, deja blesse d'un coup d'epee, voyant tout son monde dans une
telle deroute, voulut monter dans le canot d'un des meilleurs colons,
Rene Cuillerier. Pour s'aider a y embarquer, il saisit le fusil, mais
par un faux mouvement, il le fit tremper dans l'eau, le rendant ainsi
inutile. Les Iroquois qui ont apercu cet accident si funeste, criblent
de coups de fusil le canot avant qu'il ait pu gagner le large. M. Vignal
tombe couvert de blessures et est fait prisonnier avec Cuillerier.
Il est jete "comme un sac de ble" dans un canot des Iroquois, et son
compagnon d'infortune est mis dans un autre.
Malgre les vives souffrances que lui faisaient eprouver ses blessures,
M. Vignal, tout couvert de sang, se levait frequemment et adressait
aux prisonniers, proches de lui dans d'autres canots, des paroles
d'encouragement et de consolation: "Tout mon regret, au milieu des
souffrances que j'endure, est d'etre la cause que vous soyez dans un si
triste etat; mes amis, prenez courage, endurez pour l'amour de Dieu."
Ces paroles prononcees par un homme qui etait lui-meme tant a plaindre,
crevaient le coeur de tous ces pauvres captifs.
Les Iroquois ayant traverse le fleuve, allerent debarquer a la prairie
de la Madeleine. La ils donnerent des soins aux blesses pour pouvoir les
amener comme des trophees de victoire dans leurs tribus. Mais M. Vignal
avait recu des blessures si graves que les Iroquois renoncerent bientot
a le guerir, et voyant qu'ils ne pourraient l'amener jusques en leur
pays, ils le tuerent deux jours apres, le 27 octobre 1661, puis ayant
fait rotir son corps sur un bucher, ils le mangerent. "Ils lui donnerent
ainsi, dit M. Dollier de Casson, d'offrir a son createur, le sacrifice
de son corps en odeur de suavite, etant brule sur un bucher comme le
grain d'encens sur le charbon sans qu'il restat rien de son corps."
Cette _robe noire_ dont les sauvages voulaient faire leur plus beau
trophee et qui devait etre la victime sur laquelle se serait exercee
leur cruaute, venant a leur manquer, c
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