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a mere avait les yeux fermes et mettait sa main sur l'epaule de son enfant. Elle, la pauvre mignonne, avait une robe bien laide et toute dechiree, un vilain mouchoir sur sa tete; ses mains etaient nues. Elle avait des grands yeux bleus pleins de larmes, qu'elle levait parfois en tendant sa petite main rougie vers les passants qui ne la regardaient pas. Oh! qu'ils etaient mechants! Quand je la vis ainsi grelottante et si triste, je frissonnai moi-meme sous mes flanelles. Je fis un grand effort pour designer la pauvrette; mais comment remuer sous les robes pesantes qui m'entortillaient et m'emprisonnaient completement! J'essayai de crier, mais le bruit de la rue couvrit ma voix. D'ailleurs, nous allions tres vite, et la petite mendiante disparut... Je pleurai tout bas, et j'y pensai longtemps. A la fin, comme j'etais bien fatiguee, je m'appuyai sur le bras de petite mere, et ne vis plus qu'a demi les lumieres qui dansaient en fuyant. Jacques me porta dans la maison. Papa nous attendait, et tout le monde se mit a table pour diner. Je fus d'une sagesse exemplaire ce jour-la! C'etait charmant de voir comme je ne parlais pas, moi qu'on gronde toujours pour trop bavarder!... Je ne mangeais pas beaucoup non plus, on trouvait cela bien singulier, car habituellement j'ai l'appetit d'un gros loup. A la verite, je me sentais bien pesante, et ma tete alourdie avait des envies folles de tomber sur l'epaule de maman. --Comme je serais bien dans mon lit! me disais-je tout bas. Marguerite m'amena avant qu'on eut fini. Je me laissai faire sans pleurer, ce qui est tres rare; et, quand elle me deposa dans mon lit tiede et mollet, l'egoiste Antoinette s'endormit sans songer a la pauvre cherie qui avait faim la-bas, dans la grande rue froide. Soudain, quelque chose passe devant moi en m'effleurant... C'est un quelqu'un mysterieux, vetu d'une longue tunique blanche et vaporeuse. Marguerite m'assure que c'est mon ange gardien. Sa douce figure me sourit et m'invite. Fascinee par cet appel irresistible, je mets ma main dans celle qu'il me tend, et nous nous envolons doucement tous les deux... Me voila de nouveau dans les rues claires et bruyantes. Je ne sais comment il se fait que le joli bonnet de peluche est sur ma tete!... Maman, craignant toujours les intemperies de l'hiver, me l'aura mis a mon insu au moment du depart, je suppose. Nous avions voyage a travers la ville eblouissante pendant quelques
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