es lignes de la Roya. Ce jeune
officier, devenu general de brigade, avait ete destitue par Aubry, et se
trouvait a Paris en non-activite, reduit presque a l'indigence. Il avait
ete introduit chez madame Tallien, qui l'accueillit avec sa bonte
accoutumee, et qui meme sollicitait pour lui. Sa taille etait grele et
peu elevee, ses joues caves et livides; mais ses beaux traits, ses yeux
fixes et percans, son langage ferme et original, attiraient l'attention.
Souvent il parlait d'un theatre de guerre decisif, ou la republique
trouverait des victoires et la paix: c'etait l'Italie. Il y revenait
constamment. Aussi, lorsque les lignes de l'Apennin furent perdues sous
Kellermann, on l'appela au comite pour lui demander son avis. On lui
confia des lors la redaction des depeches, et il demeura attache a la
direction des operations militaires. Barras songea a lui le 12
vendemiaire dans la nuit; il le demanda pour commandant en second, ce
qui fut accorde.
Les deux choix, soumis a la convention dans la nuit meme, furent
approuves sur-le-champ. Barras confia le soin des dispositions
militaires au jeune general, qui a l'instant se chargea de tout, et se
mit a donner des ordres avec une extreme activite. La generale avait
continue de battre dans tous les quartiers. Des emissaires etaient alles
de tous cotes vanter la resistance et le succes de la section
Lepelletier, exagerer ses dangers, persuader que ces dangers etaient
communs a toutes les sections, les piquer d'honneur, les exciter a egaler
les grenadiers du quartier Saint-Thomas. On etait accouru de toutes
parts, et un comite central et militaire s'etait forme enfin dans la
section Lepelletier, sous la presidence du journaliste Richer-Serizy. Le
projet d'une insurrection etait arrete: les bataillons se formaient,
tous les hommes irresolus etaient entraines, et la bourgeoisie tout
entiere de Paris, egaree par un faux point d'honneur, allait jouer un
role qui convenait peu a ses habitudes et a ses interets.
Il n'etait plus temps de songer a marcher sur la section Lepelletier
pour etouffer l'insurrection dans sa naissance. La convention avait
environ cinq mille hommes de troupes de ligne. Si toutes les sections
deployaient le meme zele, elles pouvaient reunir quarante mille hommes,
bien armes et bien organises; et ce n'etait pas avec cinq mille hommes
que la convention pouvait marcher contre quarante mille, a travers les
rues d'une grande capitale. On pouvait tout au plus esperer d
|