vaient pu concevoir une telle pensee,
je leur dirais: "Examinez bien ce que vous imputez a votre Souverain, a
l'objet de votre royalisme et de votre affection!"... Certes, nous ne
pouvons croire qu'il soit considerable le nombre de ces Francais qui,
lorsque nous les invitions a se joindre a nous de coeur et d'ame, dans
l'interet de notre grande et glorieuse cause, ont interprete notre
demarche d'une maniere si erronee, que de s'imaginer que nous prenions
avec eux le ton d'une superiorite morale. Cette absurde accusation ne peut
etre consideree que comme un deplorable reste de cet esprit d'hostilite
qui a si long-temps divise les deux nations anglaise et francaise, et qui
n'a pu encore totalement faire place a de plus doux sentimens, a ces
sentimens d'amities et de fraternites nationales qui n'ont cesse d'animer
les avocats de l'Afrique dans toutes leurs communications avec les peuples
etrangers. Et qu'on ne croie pas que, par ces mots, je pretende faire un
grand merite a mes compatriotes de leur philanthropie. Graces au Ciel,
nous sommes arrives a une epoque, nous vivons dans un temps ou la
philanthropie fait partie de l'economie politique elle-meme. Chacun sait,
ou est a portee de savoir que la prosperite d'un pays profite a tous les
autres, qu'au lieu de fonder leur elevation et leur felicite sur
l'oppression et le malheur des autres, chaque peuple est interesse aux
progres et au bien etre de tous. Ces idees ne sont pas le resultat des
emotions souvent passageres du coeur humain; ce sont des principes stables
et fixes que l'experience a confirmes; c'est une emanation de cette haute
sagesse, de cette bonte divine qui preside aux mouvemens et a tout
l'ensemble du systeme moral de l'univers.
Ah! fusse-je anime par cette injuste haine contre la France, que doivent
m'imputer ceux dont je combats, en ce moment, les absurdes accusations;
fusse-je assez lache pour souhaiter, entre nos deux nations, une autre
rivalite que cette honorable emulation par laquelle deux peuples genereux
luttent de vertu et d'honneur; au lieu de conjurer la France de concourir
avec nous au grand ouvrage de l'abolition de la Traite, je devrais
m'applaudir de voir la nation francaise courir cette carriere coupable que
le remords et la honte ont fuit abandonner aux autres peuples.
Mais, si l'Angleterre a ete calomniee en France, la France, a son tour, a
ete calomniee en Angleterre. En effet, on nous a dit, (et j'aime a croire
que la calomnie seule a
|