rtaine veneration, oubliant qu'elle-meme l'avait revetu de
cet habit a palmes vertes ou sa nullite disparaissait.
En cette parfaite association, sans joie, ni intimite ni communication
d'aucune sorte, une seule note humaine et naturelle, l'enfant; et cette
note troubla l'harmonie. Tout d'abord rien ne se realisa de ce que le
pere voulait pour son fils, lauriers universitaires, nominations au
grand concours, puis l'Ecole Normale et le professorat. Paul, au lycee,
n'eut que des prix de gymnastique et d'escrime, se distingua surtout par
une cancrerie volontaire, entetee, cachant un esprit pratique et le sens
precoce de la vie. Soigneux de sa tenue, de sa figure, il n'allait
jamais en promenade sans l'espoir hautement declare entre gamins, de
"lever une femme riche." Deux ou trois fois, devant le parti-pris de
paresse, le pere avait voulu sevir brutalement, a l'auvergnate; mais la
mere etait la pour excuser et proteger. Astier-Rehu grondait, faisait
claquer sa machoire, cette machoire en avant qui lui avait valu le
surnom de Crocodilus aux annees de professorat; en derniere menace il
parlait de faire sa malle et de s'en retourner planter ses vignes a
Sauvagnat.
"Oh! Leonard, Leonard..." disait Mme Astier doucement narquoise; et il
n'en etait pas autre chose. Un jour, pourtant, il faillit la boucler
pour de bon, sa malle, quand apres trois ans d'architecture a l'ecole
des Beaux-Arts, Paul Astier refusa de concourir pour le prix de Rome. Le
pere begayait d'indignation: "Malheureux, mais Rome... tu ne sais donc
pas... Rome, c'est l'Institut!" Le garcon se moquait bien de cela. Ce
qu'il voulait, c'etait la fortune, et l'Institut ne la donnait guere, a
preuve son pere, son grand-pere et son aieul le vieux Rehu. Se lancer,
brasser des affaires, beaucoup d'affaires, gagner de l'argent tout de
suite, voila ce qu'il ambitionnait, lui, et pas de palmes sur habit
vert!
Leonard Astier suffoquait. Entendre son fils proferer de tels
blasphemes, et sa femme, la fille des Rehu, les approuver! Pour le coup,
la malle fut descendue du grenier, son ancienne malle de professeur de
province, ferree de clous, de gonds, comme un portail de temple, et
haute et profonde assez pour avoir tenu l'enorme manuscrit de
"Marc-Aurele," et tous les reves glorieux, les ambitions de l'historien
en marche sur l'Academie. Mme Astier eut beau dire, en pincant sa
bouche: "Oh! Leonard... Leonard..." rien ne l'empecha de la faire sa
malle. Pendant deux jours e
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