a ressemblance est parfaite,
le dessin magnifique, la pose et l'expression admirables. Je crois que
vous vous etes encore surpasse, je voudrais que vous fissiez beaucoup de
portraits, vous gagneriez plus d'argent, et vous seriez vite populaire;
ce qui est toujours un bien. Avec de l'argent et du succes, quand on a
le bon sens de ne pas se laisser enivrer, on arrive a plus de liberte, a
plus de moyens de developper son talent.
Esperons que vous trouverez la justice qui vous est due. Moi qui deteste
le public et qui le personnifie sous l'epithete de _giumento_, je
voudrais aujourd'hui le personnifier dans ma personne, afin de poser sur
vous la plus belle des couronnes.
Maurice a ete mal, il va de mieux en mieux; il vous embrasse et vous
aime de tout son coeur. Il fait des progres dans le dessin. Je vous
envoie un petit cavalier qui a du mouvement, quoique grossierement
incorrect. Il faut qu'il soit peintre. IL n'a de passion que pour cela.
Je ne sais vraiment pas ce que j'en ferai, s'il n'acquiert pas ce genre
de talent.
Marie[2] se porte mediocrement bien et vous serre cordialement la main.
Je vous embrasse, moi, de tout mon coeur.
GEORGE.
[1] Eugene Pelletan.
[2] Madame d'Agoult.
CLXVII
A MADAME D'AGOULT, PARIS
Nohant, 5 avril 1837.
Bonne Marie,
Je vous aime et vous regrette. Je vous desire et je vous espere. Plus je
vous ai vue, plus je vous ai aimee et estimee. Je n'en pourrais pas dire
autant de toutes les affections que j'ai soumises au grand creuset de
l'intimite, de la vie de tous les jours.
J'ai ete toujours souffrante depuis votre depart. Le printemps me
fatigue beaucoup. Par compensation, Maurice va infiniment mieux. Il
reprend a vue d'oeil, au physique et au moral. Si vous pouvez me donner
des nouvelles de ma fille, vous me ferez bien plaisir; car, depuis
quelques jours, j'en suis inquiete. Je lui ai trouve une gouvernante et
je vais la reprendre. Si vous veniez tout de suite, je vous prierais de
me l'amener; mais je crains, que vous ne soyez trop longtemps. Je la
ferai venir au premier jour.
P... va se jeter a vos genoux et vous raconter comme quoi il a mange les
plus beaux poissons d'avril qui aient jamais paru dans le departement de
L'Indre. Il a dispute de tres bonne foi contre Duteil et Rollinat, qui
s'etaient donne le mot et qui lui ont soutenu pendant tout un diner que
_la litterature ne servait a rien dans les arts_. Le malheureux
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